« Alors, tu te décides, oui ou non ? »
« Oui… Non… Je ne sais pas… Encore un peu… un peu de rêve… »

Le regard rivé sur la froide lueur des étoiles qui scintillent de mille feux dans la nuit glacée, fasciné par la magnificence de la Voie Lactée tout comme j'étais émerveillé, enfant – il y a tellement longtemps – par la magie de ces nuits du 24 décembre où je scrutais le ciel pour tenter d'apercevoir le traîneau du Père Noël, j'hésite.

« Oui, encore un peu de rêve… juste un peu, avant de… »


Un rêve… celui que j'ai vécu.

Il a débuté dans des circonstances dramatiques : la guerre en Ukraine. Un conflit abominable où des êtres humains massacraient d'autres êtres humains dans une folie meurtrière orchestrée par un dictateur inhumain. Bombes, obus et roquettes frappant indistinctement hommes, femmes et enfants, les déchiquetant pour affaiblir le moral de la population. Prisonniers torturés par des brutes sanguinaires imprégnées de vodka. Exécutions sommaires.

Une partie de la population ukrainienne – surtout des femmes et des enfants – avaient déjà trouvé refuge dans des pays limitrophes tels que la Pologne et la Hongrie. D'autres réfugiés étaient accueillis en Allemagne ou en France. C'est à cette occasion que, m'étant porté volontaire pour recevoir des Ukrainiens sous mon toit, je fus mis en relation début avril avec une jeune femme, Tatiana.

Que de différences entre nous !

Elle, svelte femme d'à peine trente ans, aux courts cheveux bruns entourant un visage triangulaire aux pommettes prononcées, au petit nez mutin, et dont les yeux bleus au profond regard étaient continuellement voilés d'une tristesse bien compréhensible. Institutrice à Kiev, elle était fiancée à un lieutenant de l'armée ukrainienne.

Moi, septuagénaire encore vert malgré une légère bedaine, aux longs cheveux châtain parsemés de fils d'argent, retraité de l'administration fiscale. J'étais veuf depuis une dizaine d'années, mon épouse – Peggy – ayant été emportée par un AVC foudroyant. Revenu de tous les combats, je vivais en quasi ermite, ne quittant mon domicile – une vaste maison située à la campagne mais néanmoins proche d'une ville moyenne – que pour me ravitailler et, chaque dernier mois de l'année, déguisé en Père Noël, œuvrer pour une association caritative qui fournit des jouets aux enfants défavorisés.

Quarante-cinq ans d'écart entre nos âges respectifs ! Notre seul point commun était la langue, ou plutôt les langues : Tatiana avait quelques notions de français ; quant à moi, je baragouinais un peu le russe, mais c'est en anglais que nous échangions le plus souvent.


Elle prit rapidement ses marques dans ma vaste demeure où je lui avais attribué la chambre d'amis. Tranquillisée par le calme qui y régnait, bien loin des combats qu'elle avait endurés, Tatiana reprenait peu à peu confiance en l'espèce humaine, dont j'étais son plus proche représentant.

Après le dîner, encore étonnée par la variété et la quantité de nourriture que nous partagions, nous prolongions souvent la soirée en discutant sur la terrasse autour d'une bouteille de bon vin ou d'autres boissons plus fortes (j'ai pu vérifier à de nombreuses reprises que la légende selon laquelle les peuples d'Europe centrale lèvent bien le coude n'était pas usurpée).

Dans un recoin de mon bureau, elle avait découvert ma guitare – une superbe Gibson acoustique 12 cordes sunburst – et me régalait de titres qu'elle affectionnait particulièrement : Bridge Over Troubled Water, The Sounds Of Silence, ou Mrs Robinson de Simon & Garfunkel, ou des Beatles comme Michelle et Yesterday, ou bien de Crosby, Stills, Nash & Young tels que Teach Your Children ou Helpless.
Délicieuses soirées…

De plus en plus en confiance, Tatiana, se laissait aller – l'alcool aidant – à des confidences et à des questions parfois indiscrètes. Un soir, avec son adorable accent et en roulant les « r », elle me demanda :

— Dis-moi, Sergueï (elle prononçait « Siergueï », et le tutoiement s'était rapidement installé entre nous), elle était comment, ta femme ?
— C'est curieux, mais elle te ressemblait beaucoup, sauf que ses cheveux étaient longs. Souvent, lorsque je te regarde, j'ai l'impression de la voir telle qu'elle était il y a quarante ans de ça.
— Comme c'est étrange, cette coïncidence… Et qu'est-ce que ça te fait ?
— J'ai l'impression d'avoir quarante ans de moins, et que c'est elle qui est encore là. Mais toi, tu n'es pas mariée ?
— Non, pas encore, mais j'ai un fiancé, Piotr, qui est officier dans notre armée. En ce moment il se bat contre les envahisseurs pour défendre notre pays.
— Vous comptez vous marier ?
— Oui, mais…

Son regard s'assombrit. Je vis une larme rouler le long de sa joue.

— … mais il risque sa vie à chaque instant. Sera-t-il encore de ce monde lorsque cette guerre sera finie ?

Embarrassé, je posai ma main sur la sienne pour la rassurer.

— Il faut espérer, Tatiana. Dans les guerres modernes, ce sont les civils qui sont les plus exposés. Pas les militaires.

Elle n'avait pas retiré sa main. Confus, réalisant ce que je venais de faire, je retirai la mienne aussi rapidement que si j'avais touché du métal chauffé au rouge.

Ce contact m'avait troublé, profondément ému. Et c'est en bégayant que je tentai une esquive :

— Il… il est tard, Tat… Tatiana, et le froid commence à tom… à tomber. Nous ferions mieux d'aller nous coucher.

Elle acquiesça, et nous nous retirâmes dans nos chambres respectives.


Dans l'obscurité, je me tournais et retournais, incapable de fermer l'œil, troublé par le furtif contact que j'avais eu avec la main de Tatiana. Comment le veuf qui se croyait endurci et dénué définitivement de tout désir sexuel était-il bouleversé à ce point par le seul contact d'un épiderme féminin ? J'avais été follement amoureux de Peggy, ma défunte épouse, à tel point que j'avais divorcé d'un premier mariage pour vivre avec elle. Elle qui me manquait tant… Des pensées fulguraient dans ma tête.

Après plusieurs heures d'attente de la venue d'un sommeil libérateur, je m'assoupissais lorsque mon attention fut attirée par de légers bruits provenant du couloir de la partie nuit de la maison. Je pensai que la belle Ukrainienne se rendait aux toilettes, mais ses pas – car il s'agissait bien de pas – s'arrêtèrent à la hauteur de ma chambre. Un silence, puis quelques frôlements contre la porte, et enfin une voix qui susurrait :

— Sergueï… Tu dors, Sergueï ?

Je sortis de ma torpeur pour lui répondre :

— Non, Tatiana, je ne dors pas. Qu'y a-t-il ?
— Je peux entrer ?
— Bien sûr. Que puis-je faire pour toi ?

La porte s'ouvrit, et dans la pâle clarté de la Lune qui filtrait à travers les rideaux, je vis Tatiana s'approcher de mon lit.

Elle était nue.

— Sergueï… Je ne peux pas dormir.
— Moi non plus ; je ne sais pas pourquoi, mais je ne peux pas fermer l'œil.
— Eh bien, c'est difficile à dire… mais je voudrais faire quelque chose pour toi. Pour te remercier de m'avoir accueillie chez toi, pour tout ce que tu fais pour moi.
— Il suffit de me dire « merci », Tatiana.
— Je le sais bien, mais je voudrais faire quelque chose de plus…

Sans attendre ma réponse, elle s'assit au bord du lit.
Elle ne disait plus rien, mais je sentis sa main se poser sur ma poitrine.

— Mais…
— Chut, ne dis rien.

Sa main s'était à présent glissée sous le drap pour descendre vers mon ventre. Bien loin de s'y arrêter, elle poursuivit son chemin jusqu'à ma verge, qu'elle se mit à flatter de ses doigts fins. Sidéré par la tournure des évènements, je la laissai faire, honteux de ne pouvoir lui offrir qu'un membre flasque. Il faut dire que suite au décès de mon épouse, ma libido s'était drastiquement effondrée. Je n'avais plus aucun désir ; ma verge ne me servait plus qu'à uriner. Et pourtant, cette main féminine qui s'efforçait de lui faire retrouver sa vigueur d'antan m'émouvait intérieurement, sans que cet émoi ne se traduisît par la moindre rigidité.

— Tu n'en as pas envie, Sergueï ?

Embarrassé, je tentai de mettre de l'ordre dans mes idées avant de lui répondre :

— Envie ? Peut-être… mais pouvoir, ça, je ne sais pas.

Ma réponse ne découragea pas la belle Ukrainienne qui entreprit de langoureux effleurements, réveillant peu à peu mon membre endormi depuis tellement longtemps… Lorsqu'il atteignit une solide érection, elle s'en empara à pleine main ; il ne lui fallut que quelques va-et-vient pour lui faire cracher trois jets de sperme sur ma poitrine tandis que je me cambrais en gémissant sous l'effet de ce plaisir que je croyais à jamais disparu.

Sitôt fait, elle se releva et rejoignit sa chambre.
Je n'eus même pas la force de la remercier ; je m'endormis comme une masse.


Le lendemain matin, devant nos tasses de café, des regards gênés s'échangèrent, mais aucun de nous ne fit allusion à ce qu'il s'était passé durant la nuit. De même, toute la journée se passa sans que le sujet ne fût remis sur le tapis. Pourtant, le soir venu, le même scénario se reproduisit : Tatiana me rejoignit dans ma chambre pour me gratifier d'une douce caresse manuelle que je souhaitais de tout mon cœur mais que je n'osais pas espérer.

Finalement, cette pratique devint une habitude quotidienne : chaque soir, la jeune réfugiée venait me soulager puis retournait dans sa chambre, où parfois je l'entendais haleter puis gémir sous l'effet du plaisir qu'elle se prodiguait.


Un soir d'août – le 17, pour être précis – alors que, la tête posée sur ma poitrine, elle s'occupait une fois de plus de ma vieille verge et que j'appréciais ses exquises caresses en fermant les yeux pour mieux me concentrer sur mon plaisir, je sentis une chaleur humide autour de mon gland gorgé de sang. Surpris, j'ouvris les yeux pour comprendre l'origine de cette délectable improvisation : sa tête se mouvait d'avant en arrière. Une fellation ! Cette caresse dont j'étais si friand…

— Tatiana, que fais-tu ?

Elle s'interrompit pour me répondre :

— Tu le vois bien. Tu n'aimes pas ?
— Oh, que si ! J'adore cela, mais je te demande d'arrêter.
— Mais… pourquoi ?
— Ben, je voulais te faire un cadeau pour ton anniversaire.

C'est vrai que nous avions descendu une bouteille de champagne rosé au cours d'un dîner fin pour fêter mes 76 ans.

— J'apprécie beaucoup, Tatiana, mais pense à Piotr…

Elle fit une moue charmante avant de répondre :

— C'est vrai que je pense à lui ; mais, comme vous dites en France « Sucer n'est pas tromper. »

Son argument fit mouche. Mais je pensai que si elle m'avait fourni une autre réponse, je l'aurais tout aussi bien acceptée car les préliminaires qu'elle m'avait octroyés m'avaient donné une irrépressible envie de jouir entre ses lèvres pulpeuses. Je la laissai donc poursuivre jusqu'à ce que je hurle mon plaisir. J'eus toutefois la décence de ne pas lui demander d'avaler ma semence.

Cette nuit-là, seule dans sa chambre, Tatiana ne chercha pas à modérer les manifestations de son plaisir : elle cria presque aussi fort que moi lorsque son orgasme l'emporta.


— Tu sais, Sergueï, je me suis branlée cette nuit, et j'ai joui très fort.
— Oui, je t'ai entendue, Tatiana, et moi aussi je me suis donné du plaisir pendant que tu te masturbais.
— Ah ? fit-elle, un peu déçue. Je ne t'ai pas satisfait en te suçant ?
— Bien sûr que si, chère Tatiana, mais t'entendre te caresser était tellement excitant que je n'ai pas pu résister à le faire en même temps que toi.

Elle réfléchit un instant avant de déclarer :

— Si tu as été excité en m'entendant, est-ce que tu aimerais me voir me caresser ?

Abasourdi par cette proposition, je restai coi. Il me fallut une dizaine de secondes pour pouvoir enfin articuler :

— Mais… enfin…
— Tu ne me connais pas, Sergueï. Pas beaucoup, en tout cas. J'aime me montrer. Et je jouis encore plus fort quand je sais que je suis regardée.
— Bon, on verra…

Le soir même, au lieu de me rejoindre dans ma chambre comme d'habitude, elle m'appela dix minutes après que je me sois couché.

— Sergueï, tu peux venir maintenant. Je suis prête.

J'en avais envie, mais je résistai au désir qui me poussait à la rejoindre car je pressentais que si j'allais dans sa chambre, cela pourrait aller plus loin qu'une simple exhibition. J'avais des scrupules : je ne voulais pas qu'elle trompe son Piotr ; notre relation était déjà assez équivoque comme ça ! Je lui répondis :

— Non, Tatiana, pas ce soir.
— Mais moi, j'ai envie…
— Non, te dis-je !

Quel effort avais-je dû faire pour refuser une offre aussi tentante… difficile de trouver le sommeil ! C'est pourtant ce que je tentai de faire, mais bientôt des gémissements en provenance de la chambre de la belle Ukrainienne se firent entendre. J'enfouis ma tête sous la couette pour les atténuer, mais ils allaient crescendo, me provoquant un forte érection. Soudain, ses gémissements cessèrent, mais l'accalmie fut de courte durée car ma porte s'ouvrit à la volée sur une Tatiana déchaînée :

— Je veux une bite ! Une vraie bite ! Maintenant !
— Mais…

Peine perdue : elle fit voler la couette et se jeta sur moi telle une furie et s'accroupit, ses genoux de part et d'autre de ma poitrine. Elle dut sentir mon dard érigé contre sa croupe.

— Et ça, qu'est-ce que c'est ? C'est pas une bite, ça ?

Elle saisit d'une main mon membre et s'empala d'un coup, l'insérant au plus profond de son vagin en soupirant « Ah, que ça fait du bien… », et sans attendre elle se mit à onduler lascivement des hanches pour bien sentir mon gland tout gonflé frotter les parois de son étroit fourreau bien lubrifié. Elle se mit à haleter, et rejetant sa tête en arrière, elle gémit :

— Piotr… Oh, Piotr…

Sur le point de jouir, c'est à son fiancé qu'elle pensait !
L'image de mon épouse, qui ressemblait tellement à Tatiana, s'imposa à moi. Des paroles involontaires m'échappèrent :

— Ah, Peggy… comme tu m'as manqué… ça faisait si longtemps…

Même si nos esprits divergeaient, nous emportant chacun dans un rêve éveillé, nos corps s'accordaient à merveille, et c'est simultanément que l'orgasme nous emporta loin de ce monde.


Tatiana venait régulièrement rejoindre ma couche, jusqu'à un soir où, regardant à la télévision un reportage sur le conflit qui déchirait son pays, Tatiana s'exclama :

— Piotr ! C'est lui, là !

Ce soir-là, elle demeura dans sa chambre. Les jours suivants aussi.
Quelque chose s'était cassé en elle.


— Dis, Sergueï, il faut que je te dise quelque chose. Tu ne m'en voudras pas ?

J'avais deviné, et je craignais ce que j'allais entendre.

— Tu peux tout me dire, Tatiana. Je comprendrai.

Elle hésita avant de poursuivre :

— Eh bien… il faut que je retourne dans mon pays. Je veux rejoindre Piotr, et combattre avec lui pour la liberté de mon peuple.

Le coup fut dur à encaisser, mais je m'y attendais. Cependant un grand poids s'abattit sur moi, me clouant au sol comme si j'avais pesé une tonne. Et c'est la gorge sèche mais les yeux humides que je lui répondis :

— Tu es libre, Tatiana. Fais selon ton désir ; je ne te retiendrai pas. Va rejoindre celui que tu aimes. Et merci pour ces moment intenses que nous avons partagés.

Elle ne dit mot, et tourna les talons en direction de sa chambre.
Pendant qu'elle s'éloignait, je crus l'entendre sangloter.

Le lendemain, je la conduisis à la gare. Lorsque le train s'ébranla, nos regards restèrent rivés l'un à l'autre aussi longtemps que possible.


Depuis ce jour, je ne vis plus. Désorienté, désabusé, je suis obsédé par des idées noires, continuellement dans l'angoisse de savoir Tatiana exposée aux dangers de la guerre qui continue de faire rage en Ukraine. Je scrute les reportages télévisés pour tenter de reconnaître parmi les combattants celle qui a partagé ma vie durant quelques mois et m'a donné l'illusion d'une jeunesse retrouvée. Mais ces quelques mois, je les paye durement à présent qu'elle est partie, et le poids des ans se fait encore plus sentir qu'avant l'arrivée de Tatiana dans ma vie.

Un appel sur mon portable : c'est le président de l'association.

— Hello, Sergueï ! Tu vas ?
— Bof, il y a des hauts, mais aussi des bas. Et toi ?
— On fait aller… Dis-moi, tu seras disponible ce samedi 24, l'après-midi et en début de soirée ?
— Ben oui, je n'ai pas grand-chose à faire en ce moment. C'est pour quoi ?
— Cette année, on a besoin d'un Père Noël au pied du grand sapin érigé au centre-ville de Périgueux. Tu es partant ?
— Bah, ça me changera les idées…
— Merci, Sergueï ; tu nous enlèves une belle épine du pied ! Alors passe ce soir au local pour essayer ton déguisement.
— Ça marche. À tout à l'heure.
— À plus, mon vieux, et encore merci !


Le lendemain, vêtu de la tenue rouge et blanche de rigueur, équipé d'une perruque et d'une longue barbe, c'est un Père Noël rendu bedonnant grâce à une longue pièce de tissu enroulée autour de son ventre – a-t-on jamais vu un Père Noël maigrichon ? – qui se tient au pied de l'immense sapin illuminé. Il agite une clochette dorée et se prête complaisamment aux demandes des familles qui prennent des photos de leur progéniture en compagnie de ce gros bonhomme qui intimide les enfants.

À présent, la nuit s'est installée ; les passants se font rares. Tous se pressent pour rejoindre la chaleur de leur domicile et le plaisir des festivités, sans même jeter un regard au sapin illuminé. À son pied, le Père Noël se retrouve bientôt seul dans la nuit glaciale. Son regard triste se porte alternativement sur la neige piétinée et la cime du sapin. Plus personne…

Il entreprend d'escalader l'arbre ; c'est difficile car les branches lui fouettent le visage, et à plusieurs reprises il faillit perdre l'équilibre et chuter, mais il parvient à quelques mètres de son sommet. Pendant plusieurs minutes il observe la ville silencieuse puis il défait la longue pièce de tissu qu'il avait enroulée autour de sa taille. Ayant fait un nœud coulant à l'une de ses extrémités, il attache solidement l'autre à la base d'une branche. Calmement, il resserre le nœud autour de son cou.

Les étoiles scintillent dans l'air pur et glacé : c'est la dernière image qu'il emporte. Cette vision s'assombrit progressivement pendant qu'il suffoque. Sa dernière pensée est pour Tatiana et Peggy, dont les images indissociables se mêlent dans son esprit qui s'embrume.


Le lendemain matin, un gamin qui regarde par la fenêtre s'exclame en désignant le sapin :

— Maman, papa, venez voir ! Le Père Noël, on dirait un vrai !