Chapitre 4

Avant de sortir, je désigne le grand sapin de Noël, mais je ne sais exactement comment formuler de façon cohérente ma question sur sa présence totalement farfelue en cette période de l'année. Mais elle a un petit rire ; elle a bien saisi ma perplexité :

— C'est demain le 25 décembre.

Plutôt que de nier cette absurdité, je perçois soudain le symbole et peut-être ce qu'il cache, ou plutôt révèle.

— On est… on est toujours la veille, c'est ça ? Le jour ne va jamais arriver, le jour des cadeaux à venir. C'est l'attente perpétuelle que… tu aimes ?
— Attendre peut être délicieux, répond-elle en caressant ses bras croisés. Mais pas tout le temps, non. Il va arriver. J'aime les promesses qui se réalisent. Et puis l'excitation des cadeaux, les yeux qui brillent. Viens.

Je la suis. Elle m'entraîne vers la porte de la salle à manger et je retrouve le hall d'entrée de la maison. Je n'ai aucune idée de l'heure qu'il est, mais peu m'importe. C'est la nuit, un territoire qui échappe au temps, à la morale, aux explications. Et le temps, en cela, est suspendu et élastique, il navigue avec moi mollement dans cet espace sans doute onirique qui nourrit mes sensations bienheureuses.

Le grand escalier que la femme monte m'évoque celui du Titanic, mais je m'amuse de cette idée quand elle survient. J'admire le mouvement lent de ces jambes, de ces hanches, le balancement de ce cul. Elle me jette un œil un peu moqueur. Roulement, cadence lente : elle se sait observée, et semble aimer cela.
Nous montons, et l'équivoque aussi – et le trouble – mais nous gardons le silence. Je regarde le décor de cette maison bourgeoise, ancienne, qui m'évoque la maison bourguignonne de ma grand-mère, avec une ampleur étonnante des volumes intérieurs qu'elle n'avait pas : c'est un manoir, ici.

Je suis mon hôtesse sur la coursive à gauche en haut des escaliers, cette jolie femme si attirante dont les talons claquent doucement sur le parquet de chêne. Sa démarche est tranquille, et la douceur irradie son regard et son petit sourire. Elle est pleine de tendresse : c'est sa nature, je le sens. Et de tendresse pour moi : mon cœur qui bat plus fort que d'habitude en sait quelque chose.

Arrivée au milieu de la coursive, elle pousse une haute porte couleur amande aux belles moulures de bois (Empire ? je ne sais pas), et nous nous retrouvons dans un petit vestibule : le mot « antichambre » s'impose à mon esprit qui se trouble à l'évocation immédiate de la chambre qui doit suivre…

Sur la gauche, il y a un fauteuil Voltaire, et sous un miroir doré, contre le mur tapissé, une console élégante sur laquelle est posé – de stupeur, mon cœur manque une pulsation – mon précédent livre. C'est tout à fait incroyable : cet ouvrage date d'il y a dix ans. Il est épuisé depuis des années, introuvable !
J'ai fait tout un tas de choses depuis, avant l'ouvrage qui vient de paraître et qui m'a apporté tout cela : le chèque, la Lancia, le voyage, cette nuit, le manoir, cette femme, cette console, ce livre… La boucle est bouclée. J'en ai le vertige : que fait ici, ce soir, ce livre-là ? Bon sang, ce livre qui a été au cœur d'une période si forte de ma vie passée, révolue ! Je suis submergé d'une émotion inattendue… Je regarde la femme qui semble un peu surprise de me voir brusquement tellement ému, et qui m'adresse un sourire de réconfort silencieux.

Je m'approche, prends le livre, me laisse tomber dans le fauteuil Voltaire, tourne les pages. Il m'attendait, elle m'attendait. Quelle est cette histoire sur mon chemin ?

— Tu me feras une dédicace ? demande-t-elle d'un ton léger au bout de quelques minutes.
— Oui. Tout ça… est extraordinaire. Tu es une fée ? Tu as un stylo ?
— Sell ta… Il y en a un sur la console, me répond-elle en s'avançant tandis que je me lève.

Je saisis sa taille, la pousse doucement, enroulée dans mon bras comme tout à l'heure, et elle se retrouve contre la console à me regarder dans les yeux fixement. Je pose mon livre sur le meuble. Je sens son souffle s'accélérer. Mes mains se referment sur sa taille. J'appuie mon corps contre le sien, suave et chaud. Elle redevient inerte et frémissante, désirable et immobile, tendue d'émotions, et je pose ma bouche sur la sienne. La Femme.
Sa bouche rouge…

Sa bouche qui reste entrouverte. Mon baiser insiste, et je sens ses lèvres parfumées réagir un tout petit peu tandis que ma main droite glisse au creux de son dos. Sa robe est douce. Elle se cambre, agrippée au plateau de la console contre laquelle je la maintiens acculée.
Son cul, oui, ses fesses contre la console, ses fesses que désirent mes mains. Mes doigts descendent sur le dessus de cet arrondi charnu, tout chaud. Mon autre main contre sa joue, caresse enveloppante ; sa peau est si douce… et sa bouche laisse passer ma langue prudente.

Elle est tout essoufflée, et sa respiration chahutée m'excite follement, précipite les battements anarchiques de mon cœur. Son souffle chaud, ses yeux mi-clos qui me traversent de leur beauté irréelle… Elle répond à mon baiser, à ma langue, timidement, mais elle m'embrasse elle aussi ! Merveille.

Ma main autonome a besoin d'action. Elle glisse le long de sa cuisse et relève sa robe. Au-dessus de la lisière de ses bas, sa peau. Salive, peau… Mon érection forte, elle le sait, ses cheveux doux sous mes doigts, son corps plaqué au mien. Elle s'accroche à cette console comme une naufragée qui va se noyer.

De sa joue je laisse descendre mes doigts sur son cou, sur ses seins dont je caresse et enveloppe les rondeurs, sur le dessus, son grain de beauté dans ma paume. L'émotion et la passion dansent toutes les deux. Ses seins, son souffle et sa langue me rendent fou, vraiment fou. Je ne sais au cœur de quel rêve je me trouve enfermé volontaire, mais je ne souhaite pas en sortir, pas me réveiller : ici est la réalité. Je suis venu te voir, et tu m'accueilles.

Et soudain, mais tendrement, elle détache sa bouche souriante de la mienne, les joues toutes rouges, et le souffle coupé elle murmure :

— Il faut… Il est l'heure…
— L'heure de quoi ? je lui murmure en frémissant d'inquiétude soudaine.
— De reprendre ton chemin.
— Quoi ?

Je fronce les sourcils : aucune envie de reprendre la route. Le reste du monde est dans la nuit, est en panne. Ce qui n'est pas elle et dans cette pièce, je m'en fous, gast, ça n'existe pas !

— Avec moi ! sourit-elle joyeusement pour me rassurer. Ensemble, le chemin.
— Ensemble… Alors oui. Où tu veux.

Elle se dégage alors, émue et rieuse, et me prend par la main. Elle m'entraîne devant la porte qu'elle pousse, qu'elle ouvre en grand en observant ma réaction.
La chambre, le lit, une couette de vichy rouge. La chambre.

Mais je suis joueur, et ce lit plein de promesses délicieuses semble me dire que j'ai le temps de prendre mon temps : aussi avant de passer le seuil, je l'enlace. Elle sourit, et debout face à l'entrée de la chambre, je l'étreins plus violemment, glisse ma langue dans sa bouche et passe ma main dans son décolleté. Mon autre main relève sa robe et se referme sur sa fesse gauche, ronde et chaude, laissée nue par le string dont j'ai effleuré la dentelle.

Je dégage son téton que je lèche et suce ; j'impose ma bouche, ma langue à ses seins libérés. Elle caresse mes cheveux, le regard vague, délicieusement excitant d'abandon, de flottement et d'envies.
Au bout de quelques minutes de pelotage torride, elle murmure de sa voix chantante, enrouée par le désir :

— Tu attends quoi… pour me pousser dans cette chambre ?

Je ne sais pas si c'était dans ma tête ou dans la sienne, si elle a vraiment dit cela, mais… allons-y !
La chambre, le lit.
Éclairage doux, ambiance chaude : notre nid de cette nuit.

Notre baiser reprend, passionné, fébrile, tandis que près de ce lit elle me déshabille. J'enlève mes chaussures alors qu'elle fait un sort à mon sweat-shirt fin. Je l'aide à enlever mon jean. L'impatience allume son regard d'une belle dose de folie qui m'enflamme. Elle caresse ma queue tendue dans mon slip mais ne va pas plus loin, m'assied d'autorité sur le bout du lit et enlève enfin en un tournemain sa robe rouge qu'elle jette d'un geste vif sur un autre fauteuil Voltaire près du lit pour m'apparaître plus sexy et désirable que je n'aurais pu l'imaginer.

Une bombe atomique !

Soutien-gorge serré de dentelle, joli string, dessous aux petits nœuds de satin, bas noirs. Elle a viré ses escarpins dans un coin et me dévisage, frissonnante et triomphante, en train de l'admirer intensément, en train de bander, de m'enivrer des effluves de son parfum.
Je lui lance alors avec un grand sourire :

— Ah, OK, j'ai mis le temps à piger. Tu es celle qui distribue les coups de foudre, hein ?

Elle éclate de rire.

— Ma cible préférée, c'est le soleil ! Réchauffe-moi…

Elle vient contre moi qui suis assis sur le bord du lit et je prends son bassin entre mes bras. J'embrasse son ventre doux et parfumé tandis qu'elle caresse mes cheveux, frémissant sans cesse, plongé dans l'infinie douceur. Mes mains reviennent sur le devant de son corps pour s'emparer doucement de ses seins là-haut. Elle tend son ventre, son bassin, ses seins contre moi de la plus affolante des façons, et mon cœur bat à tout rompre. Bordel, que c'est bon !

Elle me pousse alors sur le lit pour que je m'allonge. Elle rit, se penche et descend mon slip le long de mes cuisses d'un geste vif. Mon sexe libéré jaillit. Elle le regarde intensément, gourmande et impatiente, et ce regard me bouleverse et me durcit. Elle me rejoint sur le lit, m'enjambe.

Mais j'ai envie de rire, de ne pas la laisser faire, et je la fais basculer à mes côtés en plongeant sur sa bouche qui me dévore aussitôt. Je masse ses seins dans la dentelle, ses fesses nues. Elle se tortille sur le lit en frissonnant, caresse ma queue par moments divins. Nous nous pelotons avec passion, et… je manque de ruiner toute l'ambiance – voire toutes mes chances – en échouant lamentablement, comme un ado débile, à détacher l'accroche de son soutien-gorge.
Satanée putain de foutue attache de soutif !

D'un seul coup j'ai l'air d'un con, mais son éclat de rire efface toute ma contrariété par l'impatience brûlante du regard qu'elle me lance en enlevant son soutien-gorge en une seconde, à l'aveugle, les bras dans le dos en bombant le torse.
Ses seins sont merveilleux ; ils me passionnent aussitôt, et j'efface à mon tour son rire en les prenant dans mes mains. Elle a une petite grimace de désir, ferme les yeux. Ses tétons roulent entre mes doigts, sa bouche entrouverte se crispe de temps à autre quand ma bouche goûte ses seins, je bande comme un dingue, il fait chaud dans ce nid, sur ce lit hors du monde au fond de la nuit…

Je renverse alors la belle sur la couette, la domine, me régale de ses seins. Elle sourit, sa jolie tête dans les oreillers doux, et je descends lentement sur son ventre. Ses doigts me tirent un peu les cheveux pour exciter mon désir (qui n'a besoin de rien, mais qui aime beaucoup cela aussi). J'approche de son pubis, du petit nœud qui décore le haut de son string de dentelle.
Prenant tout mon temps, je respire son sexe à travers cette dentelle.

Elle écarte un peu les jambes pour accueillir mon corps, ma bouche qui veut fondre sur son désir. Je sens ce parfum d'impatience qui rend folle ma queue qui va devoir attendre : la femme sans visage des coups de foudre, voilà, je suis à ses pieds, je suis là pour elle.
Je suis l'invité du manoir. Elle m'invite, ouvre un peu plus les cuisses ; j'embrasse son sexe, dentelle mouillée. Elle prononce mon prénom à voix basse plusieurs fois, me colle la chair de poule.

Écartons la dentelle…
Petite toison étroite, chic et excitante, et ses lèvres toutes jolies sous mes yeux. Je dépose un baiser sur cette jolie petite chatte luisante d'envie, entrouverte de désir et de parfums chauds, qui m'attire si fort.

Ma langue, prudemment.
Ma langue. Je guette ses frissons, je prends mon temps : ma bouche est pour elle, à elle. Ma langue en elle, elle écarte maintenant bien ses jambes pour m'inviter pleinement dans son plaisir à venir, dans le nid le plus intime de notre nid, dans le trésor secret si adorable au bout de mon chemin. Je la mange doucement, et les ondulations de son corps sur cette couette en vichy rouge plongent mes nerfs, mon cerveau et mon sexe dans la fournaise. Je suis à elle, et elle veut m'apprendre la foudre pour que je la transperce d'un éclair à mon tour, qu'elle décolle du chemin pour retomber toute molle et souriante.

Tout est retenu, concentré, extrême : sa respiration bouleversée comme des vagues qui grossissent et qui dévalent, les frissons de son corps ondulant dans le désir, et toutes mes caresses minuscules au cœur du volcan. De l'orage brûlant ! Le plaisir gonfle peu à peu, une danse lente et nerveuse de son corps sur ce lit rouge et blanc, et la vivacité de ma langue, de mes doigts, prennent aussi de l'ampleur. Elle gémit par instants, de plus en plus, et je deviens fou !
Crispation forte, un sursaut qui dure, si joli tremblement, et de là-haut elle me lance un regard flou, me demande à voix basse :

— Viens…

Je me redresse et viens au-dessus d'elle lentement. Je souris. Ma queue est douloureuse de tensions, d'impatience. Elle la regarde d'un coup d'œil intéressé et me bascule sur le lit en riant. Nos rires se mélangent en un baiser tendre et nous renversons nos rôles sur ce lit : elle attrape quelque chose sur la tablette à la tête du lit, derrière le rempart doux des oreillers, et prestement m'allonge sur le dos pour venir me chevaucher, s'asseoir sur mes cuisses.
Sa beauté me subjugue. Je la regarde avec des yeux ronds.

Ses seins me fascinent. Je tends les mains vers eux, mais elle les repousse en fronçant les sourcils pour de rire : « Nan, laisse-toi faire ! Laisse-moi faire… » et elle déclipse du pouce le couvercle du tube qu'elle a en main, un tube de gel qu'elle laisse couler dans sa paume.
Je sens le parfum : de la menthe.
Mes mains posées sur ses cuisses caressent le nylon de ses bas noirs.

Elle pose le tube sur le lit et frotte lentement ses paumes en me dévisageant d'un air coquin, rêveur, qui me fait bander autant que ses seins, là sous mes yeux, que je n'ai pas le droit de toucher.

Lorsqu'elle pose doucement sa main sur mon sexe tendu le long de mon ventre, je frémis de la sensation de fraîcheur du gel qui nappe ses doigts, sa paume… Mais la sensation est de courte durée, et la chaleur envahit tout : mes veines, mes nerfs, mon cerveau !
Elle a un adorable petit sourire de triomphe en prenant doucement ma queue à pleine main, et je ne fais rien pour retenir mon gémissement de plaisir ; cette sensation est tout simplement dingue ! Je tends mon bassin vers elle, bouche ouverte pour chercher de l'air…

Ses deux mains, très lentement, me caressent, m'envoient en l'air sans pitié, très haut : le gel glissant rend irréelle la pression de ses doigts, ses mains sont brûlantes, et quand assailli de vertiges je la regarde, je vois sa peau dans la lumière tamisée de la chambre, la courbe affolante de ses seins, ses yeux de chatte qui ronronne, tout un spectacle privé et secret qui me conduit plus haut encore.
Je suis à sa merci, elle le sait et s'en amuse, et prend son temps.

Mourir de désir ? Cette nuit d'avant Noël, je ne veux pas qu'elle finisse, je ne veux pas arrêter d'avoir faim, ne pas être un beau matin rassasié, je ne veux pas déchirer le papier cadeau et le carton de l'emballage, et devenir un enfant gâté : je ne veux pas me réveiller !

Je sens que ses doigts appuient plus fortement sur ma hampe. Elle serre le poing et masse avec application ma tige qui durcit sans cesse. Elle me veut le plus et le mieux bandant possible, et à vrai dire n'a pas de gros efforts à faire pour cela : je ne suis plus qu'une bite.
Elle tend alors le bras en se penchant vers la tablette derrière les oreillers. J'en profite pour attraper ses seins et en happer un avec ma bouche, ce qui la fait rire et crier un peu, mais elle se rassied. Elle tient un sachet de préservatif. Me le tend.
Une capote… parfumée à la menthe, c'est marqué sur le sachet.

— Ken pell amzer zo ! murmure ma belle en souriant.

Hein ? Oooh… depuis combien de temps n'ai-je plus utilisé cela ? Mais la minute, ces secondes-là de cette nuit-là ne sont pas celles des questions, des inquiétudes, des doutes. Cette nuit, c'est ma fête, et la maîtresse de maison m'invite à un festin…

Déchirer l'emballage, sortir la rondelle glissante de latex, commencer à la dérouler, m'emparer de ma queue luisante de gel et tendue de désir dingue, poser la capote et la plaquer sur mon gland congestionné qui mouille tout seul d'envie pour dérouler soigneusement le latex le long de ma hampe courbée d'envies vibrantes.
Me voilà, nous voilà protégés. Tu es une fée moderne, ma chérie.

Elle reprend la direction des opérations et les choses – et mon sexe – en main. Ouiiiii… Je vois dans son regard baissé, concentré, une impatience qui m'affole, et quand elle écarte la bande étroite de la dentelle de son string, mon cœur bat à tout rompre. Elle rampe sur moi, me guide en elle d'une main ferme. Mon gland, elle le frotte un petit peu à l'entrée de sa chatte, et… le rentre en elle. Je suis en apnée.

Peu à peu, mais très vite, je me retrouve à la pénétrer. Elle joue de son bassin, de ses cuisses pour s'asseoir et s'empaler sur moi. Mon corps allongé sous elle n'est que tensions, je transpire et grimace, et j'aperçois sa bouche serrée par la concentration. Elle a posé sa main droite sur mon torse – sa main gauche tient encore la base de ma queue – et je m'enfonce dans son corps qui se tortille, tout brûlant. C'est un délire absolu de sensations fortes !
Un petit mouvement de bassin, je crie : je suis en elle !

Son regard bleu drogué à l'herbe à chat, elle ronronne, et je ne lui demande pas son avis : je prends ses seins dans mes mains. Elle remonte un peu ses fesses et je retiens un autre cri quand elle donne un petit coup de reins avec un sourire de garce attendrie pour me remettre bien au fond d'elle.

Ondulations, crispations, découverte à la menthe forte, nos peaux qui apprennent à se connaître, à glisser l'une contre l'autre, acharnées, charnues. Nous ne nous quittons pas des yeux, fascinés et amusés par une révélation en cours d'accomplissement, d'épanouissement : le plaisir que nous pouvons créer tous les deux dans un lit à carreaux rouge et blanc, c'est ma fête et le réveillon de Noël, le soleil et la foudre en pleine nuit. Tout se mélange les pinceaux, en un combat sans violence mais d'une intensité énorme.

Elle veut me faire jouir, mais je résiste et je pince ses seins, et elle coulisse par petits coups le long de mon sexe dressé pour me rendre fou, et je tiens fermement ses hanches pour plonger en elle, en haut, par surprise, pour la faire crier un peu, et elle me griffe la peau, et j'attrape ses fesses, et c'est bon, et c'est boooon… !

Son souffle, sa respiration m'affolent particulièrement. Je ne sais pourquoi, mais une partie de mon cerveau est obsédée par sa respiration : la femme qui me fait l'amour est animale, sensible ; elle est dingue, et j'aime cette vibration qui va et vient et se gonfle et s'allonge comme un drap dans le vent.

Sa poitrine ronde dans mes mains qui jouent avec, c'est pour nous deux – pour elle je crois bien, pour moi c'est certain – le cœur du dérapage, ce qui nous fait perdre pied, le contrôle, le trouble puissant qui me déroute, et pour ma part en tout cas abat peu à peu mes résistances à laisser le plaisir passer le rempart de ma volonté.
Ma volonté s'effondre comme du sable devant le bonheur qui dévale : la vague sur la plage. Je crie tout bas – un cri étranglé d'émotions – que je vais jouir. Mes mains malmènent ses seins. Je vais jouir, et mon amante le sait, qui me dévisage ; elle le sait et roule des hanches, du bassin pour faire danser plus fort en elle ma tige d'homme qui n'en peut plus…
Ses yeux ont une intensité stupéfiante. Son visage se crispe, et tout bascule.

Le non-retour et la foudre, comme une vague claquant sur un rocher qui explose, l'écume blanche et le volcan dans la même seconde ! Je serre les dents sous la morsure du plaisir et ne peux retenir un grognement presque douloureux en serrant sa poitrine chaude dans mes paumes en sueur : je jaillis en elle, et immobile je pars dans les airs. BAM ! Encore des éclairs ; elle aime bien. Je jouis très fort, et dans cette tempête au cœur de son ventre serré, tout le long de cette apothéose électrique, nous nous dévisageons avec une folle émotion, comme émerveillés l'un de l'autre… Nous étions des inconnus et nous sommes réunis. La jouissance se déverse, les ondes se croisent et se mélangent à la surface de l'eau douce.

Les spasmes diminuent peu à peu, et je vois son sourire doux éclairer à nouveau son visage. Elle est encore essoufflée et caresse ma poitrine en sueur contre laquelle elle plaque ses seins en m'embrassant. Sa langue joue avec la mienne, mais un vieux souvenir impératif vient contrer mon envie, mon besoin d'abandon : retirer ma capote. Elle sait. Elle comprend d'un sourire. Elle devine tout, ma fée de la nuit.
D'un petit mouvement de ses reins, je ne suis plus en elle et je retire la pauvre chose fripée-mouillée contenant ma jouissance. Zou !

Elle vient se coucher contre moi. Nous sommes brûlants tous les deux. Elle est au creux de mon bras, blottie. Je caresse son dos. Le câlin, une confiance aussi forte et belle sans doute que le plaisir que nous venons de prendre ensemble, l'amour que nous venons de faire.
Ensemble : coucher ensemble, couchés ensemble. Qui est cette femme ?

Son évidence me traverse, chemin de traverse. Le voyage m'a mené sur ce chemin-là, et elle semblait m'attendre. Elle me fascine et, tournant la tête, je la regarde dans la pénombre de la chambre : son visage, ses yeux fermés, son léger sourire abandonné, elle se repose dans mes bras. Tout simplement belle. Belle dans l'absolu, dans la douceur et la féminité. Sa bouche, le rouge à lèvres – très jolie bouche – une mèche de cheveux mouillés.

Soudain elle ouvre les yeux et me voit l'examiner en silence. Elle sourit, amusée. Je ne vais tout de même pas lui dire la pensée qui me vient… que je passerais bien mon temps et toute ma vie à la regarder ? Non, ce serait trop. Pas ma vie à la regarder : lui dire ça maintenant.
Des fois, ça ne me gêne pas de garder le silence, surtout… si l'on s'embrasse.

Notre baiser, très lent, juste goûter ses lèvres chaudes. Je me demande pourquoi. Pourquoi elle est là contre moi, pourquoi moi. La réalité n'est pas en doute. Sa peau douce, son parfum, ses parfums, sa voix chantante, le risotto, son sexe et la dentelle de ses bas : tout est vrai, offert.
Pourquoi ? Je ne sais pas. Peut-être est-ce cela, la clef qu'il faut trouver ? La raison de tout cela ? Le pourquoi et la raison ? Je ne crois pas. En l'embrassant lentement je me dis cela : rien n'est raisonnable, déjà, et la raison n'existe pas quand c'est évident, et c'est sans doute cela qu'on appelle le coup de foudre, non ?

Et puis mes pensées se promènent en liberté. Je me dis que j'adore la regarder et que j'adore ses seins, aussi. Je les caresse avec tendresse, comme des chats endormis que je ne veux pas réveiller, juste espérer entendre ronronner. Mais… mais la respiration de ma maîtresse qui s'accélère… Mais… son souffle me colle des frissons.
La possibilité de l'excitation. Non, pas la possibilité : elle est déjà en route, silencieusement, mais je la reconnais dans la lumière des yeux de ma fée, dans mon sexe qui va bientôt s'allonger et durcir, je le sais : je le connais, ce petit salaud qui en veut toujours plus !

Je vais peut-être réveiller les chats, finalement.