Acte 4

La dérive sexuelle avait ensuite pris une tournure plus classique. Bien sûr, les cavaliers s'étaient servis d'elle comme monture à diverses reprises, mais aucun ne l'avait vraiment martyrisée ; seules quelques claques, plus bruyantes que sonnantes, l'avaient emportée vers un paradis éphémère, celui des amantes comblées. Si les bracelets et autres colliers de chevilles ou de cou étaient encore en place, personne ne l'avait plus attachée. Maud avait bu sans renâcler plus de sperme en une soirée que durant le reste de sa vie intime. Son cul et sa chatte avaient connu des assauts démentiels, et elle y avait trouvé son compte.

Un soleil timide pointait le bout de son nez alors qu'elle reprenait son souffle après cette nuit orgiaque. Elle avait mal aux reins, mal aux muscles des mollets, des jambes, et son derrière n'en pouvait plus. Un café partagé entre tous avait conclu d'une manière amicale la nocturne improvisée. Elle n'avait qu'une hâte : rentrer chez elle pour se plonger dans sa baignoire et y rester le plus possible. Alors à peine arrivée, elle ouvrit en grand les robinets de sa seconde salle de bain, celle qui abritait une baignoire démesurément longue. Trois marches descendaient dans celle-ci.

Pendant que l'eau coulait avec un bruit de cataracte, elle se désapa vivement, envoyant valdinguer ses vêtements partout dans cette pièce très peu usitée. Ensuite, munie d'un flacon de sels de bain, elle tendit le bras pour en répandre une bonne quantité dans l'eau tiède. La réaction fit mousser l'ensemble, et une délicate saveur fruitée vint flirter avec son nez. Un soupir la secoua alors même que quelques souvenirs pas forcément heureux lui remontaient en mémoire. Les tétons de ses seins avaient légèrement gonflé, et il était probable que ses lèvres vaginales se trouvaient dans le même état. Avant qu'elle ne les quitte, Alain lui avait fait mettre dans son sac deux tubes de pommade aux inscriptions chinoises.

— Tiens. Si tu as des douleurs au niveau de tes piercings, mets ceci ; c'est un anesthésiant très puissant. Tout devrait bien se passer. Et si vraiment il y avait quelque chose, n'hésite pas : appelle-moi.
— Merci. Mais je ne crois pas que je t'appellerai une seule fois encore. J'ai vu ce que l'unique visite a donné, et je ne suis pas sûre d'avoir envie de revivre ça. Je ne dis pas que je n'ai pas apprécié, mais j'ai peur de ne plus sortir de ce cercle vicieux, tu comprends.
— Oui ; c'est ton choix, je me dois de le respecter. Mais sait-on jamais si un jour, un soir… enfin, tu verras bien. Je serai là, et pas forcément accompagné.

Elle revoyait cette manière de la traiter à son arrivée, cette fouille quasi militaire de son pote Dany, juste pour s'assurer qu'elle ne portait rien sous sa jupe ! Et si elle en avait mis une ? L'aurait-il renvoyée ? Pas la peine de se poser ce genre de question stupide : elle ne saurait jamais, un point c'est tout. Du bout d'un pied, elle vérifia la température du bain. L'eau était douce. Elle avait déjà recouvert deux des trois marches de la profonde baignoire. Alors Maud sortit une trousse avec des outils pour se faire belle. Elle se laissa enfin couler dans la flotte savoureuse. Heureuse, une chanson lui vint aux lèvres.


Elle avait taillé ses ongles ; à présent, ils lui semblaient parfaits. Elle passa plusieurs fois une éponge naturelle sur ses mamelons tendus, et sa main frotta doucement sa chatte. Pas de vraies douleurs, simplement un picotement très supportable. Le minuscule miroir de la trousse de toilette au bout de la main, Maud regarda un long moment ses deux anneaux qui restaient en place, ancrés dans la chair de ses grandes lèvres. Finalement, ça lui n'allait pas trop mal. Esthétiquement parlant, ça ne choquait pas. Elle tira sur l'un d'eux ; il tenait bien. En y regardant de plus près, elle s'aperçut que de toute façon, pour les retirer, il lui faudrait une pince coupante. Les deux créoles dorées étaient donc serties.

Elle manipula également les barrettes qui ornaient ses mamelles. D'un côté, une sorte de vis, et de l'autre, un papillon qu'elle avait pris au premier abord pour une feuille d'arbre. La barre en métal tournait dans la chair du sein sans qu'elle ressente de douleur. Les garder ou les enlever ? C'était son dilemme. Que faire, mais surtout comment expliquer à Julien leur présence ? Difficile à dire… Elle devrait assumer ses choix. Pour ne plus y penser, elle se saisit d'une paire de ciseaux, prit un coussin de caoutchouc spécialement prévu à cet effet et s'assit dessus. Son ventre était hors de l'eau.

Elle commença une taille savante de ses poils pubiens. Puis le rasoir jetable et la mousse à raser dans une sorte de bol en verre firent le reste. Les contours de sa chatte restaient dans une langue de soies douces qui montaient en forme de triangle vers son nombril. Non, elle trouva que c'était trop. Elle réduisit donc la hauteur du triangle brun ; la forme géométrique n'était plus que de quelques centimètres. Une autre idée subite lui fit revenir avec sa mousse et son rasoir. Sous ses doigts agiles, l'arête haute du triangle se transforma peu à peu en cœur. Les deux piercings se trouvaient pratiquement au centre de ce nouveau paysage.

Elle sourit en regardant son œuvre. Du bel ouvrage, propre, net, et les bijoux allaient désormais garder leur place. C'était décidé, ils ne la quitteraient pas, ils ne la quitteraient plus. Signe d'appartenance à Alain ou coquetterie toute féminine ? Aucune importance ! Un court instant, elle se demanda si ses soutiens-gorge s'accommoderaient de ces accessoires insolites. Elle balaya d'un revers de main ses craintes et oublia ses doutes. Elle saurait bien s'en arranger, il le faudrait bien. Elle termina ses ablutions, se prélassant dans l'élément qu'elle adorait. Elle se lava les cheveux, passa ensuite au séchage.

Ses tifs lui demandèrent un long moment de soins, et la matinée se trouvait largement entamée quand elle fouilla son réfrigérateur pour un en-cas bienvenu. Elle n'avait passé qu'une nuisette vaporeuse ; de toute manière, elle n'envisageait pas d'autre sortie dans la journée. Son sofa la vit s'étendre alors que le feu allumé dans la cheminée donnait un air de fête à son salon. Maud se sentait moins lasse. Elle s'endormit d'un sommeil réparateur.

La nuit avait déjà enserré de ses bras sombres tous les environs quand elle refit surface. L'insert ne contenait plus que des cendres, et elle frissonnait. Alors qu'elle se remettait sur ses pieds, le vibreur de son portable la rappela à l'ordre. Un message en attente qu'elle lut avec un geste de mauvaise humeur. Julien ne la lâcherait donc plus ? Elle composa son numéro, et instantanément il répondit. À croire qu'il avait son téléphone dans la main.

— Maud, là. Tu m'as demandé, Julien ?
— Oui, je t'ai appelée hier soir aussi. Enfin, presque toutes les heures. J'aurais voulu que tu viennes me voir.
— Écoute, je sors de ma douche et ne suis pas habillée ; je n'ai pas l'intention de sortir ce soir.
— Je peux venir, moi, si ça t'arrange ; qu'en penses-tu ?
— Je suis vraiment crevée ; on ne pourrait pas remettre ça à demain ?
— Oh, je t'en prie… Tu me manques vraiment, et je serai discret. Seulement près de toi. S'il te plaît…
— Julien ! Ne fais pas l'enfant, bon sang ! Quand je vais chez toi, tu ne me retiens pas, et quand je voudrais être seule, tu fais le forcing pour être près de moi. Tu ne sauras donc jamais ce que tu veux.
— Bon, je viens…

Maud n'avait pas eu le temps de hurler son non ; le clic de fin de conversation lui crispa les oreilles. Merde, il allait venir. Alors, comment faire pour ces bijoux intimes ? Après tout, elle se sentait encore libre de son corps, de faire ce qu'elle voulait. Il voulait venir ? Eh bien tant pis pour lui ! S'il fouillait trop, il aurait la vérité toute nue, en pleine figure surtout. Elle se sentait prête à affronter le monde. Elle jeta un coup d'œil par la porte-fenêtre : le soleil était comme une bénédiction, rassurant et fidèle ; elle resta là un bon moment. Ce fut un point rouge grossissant qui la tira de sa béatitude automnale. Julien sans doute qui arrivait.

— Ah, Maud… Comme j'avais envie de venir, tu ne peux pas l'imaginer !
— J'ai surtout besoin de solitude et de récupérer, mais tu ne m'as pas vraiment donné le choix.
— Tu regrettes ma visite ? Tu ne m'aimes donc pas ?
— Franchement ? Je n'en sais rien. Je suis dans un moment de ma vie où j'ai plus de questions que de réponses. Je me cherche, si tu vois ce que je veux dire.
— Mais… je pensais que tu trouvais ça bien, bon, quand nous faisions l'amour, et que tout allait pour le mieux.
— Ce n'est pas ça. Comment t'expliquer ? J'aime faire l'amour avec toi, bien que parfois je souhaiterais que tu sois… plus viril dans tes gestes. J'adore tes massages, mais il existe autre chose de moins soft, de plus… masculin, tu saisis ?
— En somme, tu me reproches ma douceur, et tu t'imagines que je suis à la limite… une tapette ?
— Mais pas du tout : je pense que nous pourrions allier la douceur à une certaine forme de masculinité qui me conviendrait mieux à certains moments. Je sais que je n'arrive pas à traduire en mots ces désirs nichés au fond de moi.
— Oh, que si ! J'ai compris : tu as rencontré un vrai mâle, c'est bien ça ? Un vrai, un dur, un pur ?
— Ne sois pas violent verbalement, tu veux ? C'est un peu ma vie également, et je n'ai pas envie de parler de tout cela ici, de cette manière abrupte avec toi.
— D'accord. Asseyons-nous et dialoguons comme deux amis, alors. Tu es entrée dans mon existence, et je reconnais mes maladresses, mes hésitations. J'avais besoin d'être sûr de moi pour avancer. Te voir repartir chaque fois après… nos amours me fendait le cœur, mais je voulais que mon choix soit mûrement réfléchi.
— Tu n'as rien montré de tout ce que tu me dis ; pas une fois tu n'as fait un mouvement pour me retenir. Imagine ce que cela peut avoir de frustrant pour une femme, de voir son amant pratiquement la jeter après un petit coup de…
— Tu juges donc que ce n'était que des petits coups ?
— Non ! Non ! Ce n'est pas ce que je veux dire… enfin, tu vois.
— Tu vois, tu vois… Eh bien non ! Je ne vois plus rien d'un seul coup.
— Voilà pourquoi je ne voulais pas te recevoir cet après-midi. Tu as raison, calmons-nous. Allez, viens. Tu veux boire un verre ? Un café ?
— Ah, un café ! Oui, ça me convient.

Julien ne savait plus trop quoi faire. Rester ou repartir ? Assis dans la cuisine de Maud, il regardait les hanches chalouper sous la nuisette dévoilant plus qu'elle ne cachait. La jeune femme ne s'inquiétait nullement en se penchant qu'il puisse voir ses fesses. Pas plus qu'elle ne prenait garde en se baissant vers lui pour servir les cafés que sa gorge laisse apparaître ses jolis seins bien ronds. Non, apparemment, elle était dans son monde à elle, à demi perdue dans des pensées desquelles il était absent. Depuis combien de temps tournait-il sa cuillère dans son breuvage noir ?

— Tu sais, Julien… Ho ! Tu m'écoutes ?
— Ah oui, pardon. Excuse-moi, je rêvassais.
— Tourner le café sans y avoir plongé le sucre ne sert pas à grand-chose…
— Je n'ai pas sucré ? Mon Dieu, tu me perturbe pour de bon. Alors dis-moi tout. Donc, tu ne veux plus de moi ?
— C'est beaucoup plus compliqué que cela. Écoute… Non, tiens, regarde d'abord.
— …
— Tu vas comprendre.

Elle venait de se relever, et d'un geste sans brusquerie elle leva sa nuisette. Les yeux de Julien accrochèrent immédiatement deux anneaux d'or fixés au beau milieu d'un cœur brun. Les poils étaient taillés de frais, et les lèvres qui portaient les bijoux restaient encore un peu enflées. Maud suivait les yeux de son ami sans dire un mot. Mais le mouvement lent destiné à découvrir le bas de son corps ne s'était pas arrêté ; la nuisette venait de passer le cap de la poitrine. Deux autres petites fantaisies s'inscrivirent dans le champ de vision du garçon.

— Mais… mais, c'est tout nouveau, ça ! Je ne les ai jamais vus.
— Oui, posés hier dans la soirée.
— Tu as trouvé une agence de tatouer hier ? Ça travaille le soir ou la nuit, ces trucs ?
— Pas vraiment, non. Mais j'ai surtout rencontré un homme… et il me les a posés.
— Je ne… comprends pas du tout.
— C'est pourtant simple : j'ai fait l'amour avec un type qui fait cela autrement que toi, et j'ai vraiment adoré.
— Tu as quoi ? Avec qui ? Qui c'est, ce salaud ? Dis-le-moi, je vais lui casser la gueule ! Ce n'est pas vrai… Je te prenais pour une femme sérieuse, moi !
— Parce que le fait de disposer de mon corps me rend à tes yeux moins sérieuse ? Tu as de curieuses notions de la vie. Je te rappelle que celle que j'ai est bien à moi ! Je dispose librement de mon corps, de mon sexe, et je n'ai de comptes en ce domaine à rendre à personne. Et lui, contrairement à toi, il me fait jouir d'une autre manière. J'aime tes massages, mais lui me procure autre chose. Tu vois ces joujoux sur mes seins, sur ma chatte ? C'est un ami à lui qui me les a imposés.
— Comment ça, imposés ? Tu veux dire que tu n'étais pas d'accord ?
— Je ne savais pas avant qu'ils allaient faire cela ; ils ne m'avaient pas prévenue. Mais j'ai adoré, tu saisis ?
— Comment ont-ils pu… Tu t'es déshabillée devant deux types ? Ils t'ont touchée, violée peut-être ? Tu me racontes des histoires… Pas toi, ce n'est pas vrai, pas possible !
— Violée ? Pour cela, il faut ne pas être d'accord, il faut dire NON !
— Tu étais partante pour… pour… Non, tu me fais marcher ! Je ne te crois pas.
— Libre à toi. Mais moi, j'ai besoin désormais de cette adrénaline que ce genre de chose fait couler dans mes veines. J'ai aussi besoin de tes massages, de temps en temps, et souvent je pense qu'après les traitements qu'il m'inflige, si tu me caressais toi à ta façon, ce serait… sublime.
— Tu es complètement folle, ma parole ! Je n'imagine pas une seule seconde te partager ni partager quoi que ce soit sur ce plan-là avec un autre mec. Pour moi, l'amour, c'est l'exclusivité.
— Je te laisse y réfléchir. Après tout, tu feras comme tu l'entends. Mais, ou tu acceptes mes conditions, ou nous resterons bons amis. J'ai besoin de lui, j'ai besoin de toi. J'ai envie de vous deux. Ça passe par un partage, ensemble ou séparément. Mais mon vœu, c'est ne perdre ni lui ni toi. Maintenant je ne peux pas t'obliger à aimer ma manière de voir les choses.
— Tu… C'est sûr, tu es dingue ! Bon, j'en ai assez entendu, je m'en vais. Merci pour le café. Bonne chance dans ta nouvelle vie.
— La porte ne te sera jamais fermée ici. Et chez toi ? Elle s'ouvrira à nouveau pour moi ?
— Franchement ? Je n'en sais rien. Je suis écœuré ! Alors je ne vais pas cracher sur les mois de bonheur que nous avons eus ; mais pour la suite, vraiment, je n'en sais rien.


Depuis qu'il avait claqué la porte derrière lui en filant, Maud n'avait pas eu de nouvelles de Julien. Pas plus du reste que d'Alain, auquel elle songeait aussi parfois. Le temps arrange les choses, dit-on ? Eh bien, pour elle, ça n'allait pas de soi. La douceur du kiné lui manquait, mais elle était également en manque de la brutalité de l'autre. Ses journées oscillaient en pensées entre les mains de l'un et les claques de l'autre. Ses propres caresses n'arrivaient plus à la soulager de cette tension, de ces envies permanentes que son corps lui faisait subir. Elle était comme une chienne en chaleur presque tout le temps. Ce matin, Aline était venue, inquiète de ne pas l'avoir revue ; c'était tout juste si Maud ne lui avait pas sauté dessus. Il s'en était fallu d'un cheveu pour qu'elle ne… viole son amie.

Elle prenait conscience qu'elle devait réagir. Dès le départ de la blonde, elle bondit sur le téléphone, hésitante. Qui de Julien ou d'Alain aimerait-elle voir ? Son choix se fixa sur le plus… dur des deux. Les sonneries restèrent sans réponse. Alors de rage elle avait jeté l'appareil sur la table de la cuisine. Ce salaud ne répondait jamais quand on avait besoin de lui. Mauvaise foi toute féminine, elle maugréait contre ce con.

Elle enfila un vieux jean, une paire de baskets et sortit pour se rendre dans son jardin. Son humeur maussade s'envola dès qu'elle commença à arracher quelques herbes indésirables dans ses fleurs. Les roses d'Inde étaient en semence, et elle en cueillit quelques têtes pour les mettre à sécher. En retournant à la maison pour prendre une boîte afin de les conserver, elle vit que son téléphone clignotait. Il avait rappelé, laissant un message. Dans sa précipitation pour écouter les paroles d'Alain, les fleurs furent oubliées sur la table.

— Tu m'as appelé, Maud, mais je ne pouvais répondre. Je suis chez Malou… alors… tu peux nous y rejoindre quand tu veux. Tu connais les consignes, je ne te les rappelle pas ! Bise, ma toute belle.

Ce message explicite ne lui disait rien qui vaille, mais son ventre, lui, avait déjà pris la mesure de ce qui arriverait si elle envisageait de se rendre à ce nouveau rendez-vous. Au début, en égrenant ses roses dans la boîte, elle se refusa à bouger. Non ! Elle n'irait pas se faire tringler par ces deux clowns. Pourtant le ver mangeait le fruit. Une idée, insensée, idiote, une idée conne venait pourtant de germer dans l'esprit d'une Maud totalement à la merci de ses sens exacerbés. Elle reprit l'appareil et composa un autre numéro.

— Julien, c'est Maud. Tu vas bien ?
— Oui. Ça fait bien longtemps… Que me vaut l'honneur de ton appel ?
— Je… j'ai pensé que tu pourrais venir avec moi. J'ai un rendez-vous, et besoin d'un ami pour m'accompagner.
— Un rendez-vous ? T'accompagner ? Mais tu as bien un autre copain pour le faire ; il m'a bien semblé comprendre que je ne faisais pas le poids.
— Ne dis donc pas de bêtise ! Alors, tu viens ou pas ? Comme ça, tu auras l'occasion de lui casser la figure, c'est bien ce que tu désirais l'autre jour. Allez, ne te fais pas prier, viens !
— Je crois que c'est une connerie, mais je vais plonger dedans quand même. Je veux voir cet adversaire qui a tant de place dans ta vie. J'arrive !

Ces derniers mots revenaient en boucle dans le cerveau de Maud. Folie que d‘avoir invité aussi Julien ! Ça finirait sûrement en bagarre, mais après tout, elle saurait si elle avait une chance de les garder les deux. Et le masseur n'avait pas traîné. Déjà sa voiture roulait sur le chemin d'accès à sa maison. Elle avait passé jupe et chemisier, rien dessous, conformément aux instructions du message. Restait à se souvenir de l'adresse. Qu'à cela ne tienne, ils prendraient son automobile : le GPS avait gardé en mémoire l'itinéraire. Ce fut donc ainsi qu'ils partirent ensemble vers leur destin.

Julien pressa d'un doigt rageur sur la sonnette. Alain, dans l'encadrement de la porte, regardait tour à tour la femme et le type qui se trouvaient devant lui.

— Je vois que tu as amené du renfort. Salut ; moi, c'est Alain. Et toi ?
— Julien. C'est donc vous qui…
— On va se faciliter la tâche, non ? Le « tu » nous irait mieux. Qu'en penses-tu ?
— Ben, si tu veux. D'accord.
— Alors, tu disais quoi ? À propos de Maud, je suppose ?
— C'est toi qui lui as posé ses bijoux. Tu es tatoueur ou quelque chose dans le genre ?
— Non, juste un fan de ces trucs qui pendouillent et des ordres que j'adore donner. Et puis je respecte aussi bien les femmes que les hommes. Je suis plutôt du genre dominant, et j'imagine que toi tu fais partie des, comment dire, des moutons ?
— Tu vois ça comme ça, toi. On peut aimer les femmes sans chercher à leur faire du mal.
— C'est chacun sa philosophie de la vie et du sexe. Moi, j'aime quand c'est un peu – mais juste un peu – musclé. Toi, c'est massages et compagnie, non ?
— Comment tu sais cela, toi ? Je ne t'ai jamais parlé de Julien, il me semble.
— Toi non, Maud ; mais ta copine Aline et son mari, tu crois qu'ils sont muets ? C'est bien grâce à eux que je t'ai rencontrée, non ?
— C'est vrai, mais…
— Arrête, ne cherche pas midi à quatorze heures ! Tu es née pour cela, je te l'ai dit. Au premier coup de cravache, je sens ces choses-là ; et pour toi, c'est une évidence. Maintenant, tu viens avec ton garde du corps : c'est parfait. Passe à côté et déshabille-toi ! On gagnera du temps. Allez, va ! Non, pas toi, Julien : tu restes ici avec moi. Nous avons tant de choses à nous raconter, n'est-ce pas ?

Pourquoi une fois de plus Maud avait-elle suivi à la lettre les paroles de cet Alain ? Mystère. Elle était passée dans le salon, et ses vêtements gisaient tous sur sol. Sur un fauteuil, Malou, le Noir, n'avait pas bougé. Il se contentait de regarder cette belle pouliche qui retirait ses fringues. Elle restait droite comme un I, attendant peut-être qu'on lui dicte quoi faire.

— Tu es belle, tu sais… Approche ! Tu es là pour le cul, je l'ai compris. Tu aimes ça, et ça se sent, ces choses-là. Il a raison, Alain : tu es faite pour ce genre de jeu. Mets-toi à genoux et ouvre ma braguette.

Elle a fait un pas en avant. Ses genoux sur le parquet toujours aussi rude, elle trifouillait le pantalon de toile de Malou. Avec peine en avait-elle extirpé une queue sombre que ses deux mains encerclèrent l'instrument. Lentement, en regardant bien la bite, elle entreprit de le masturber. Il dégrafa le bouton de la ceinture, et en se soulevant un peu il fit glisser le haut du pantalon sur ses cuisses. Maud se baissa encore davantage, et entre ses lèvres la hampe commença une entrée tout en douceur. Il n'intervint pas, la laissant faire à sa guise. Elle avait enduit de salive une bonne longueur du vit.

Quand elle recula sa bouche, ses mains revinrent sur la trique et elle repoussa vers l'arrière la peau qui recouvrait la tête de la bête. Un gland rose, tranchant avec la couleur sombre de la banane tout entière, se montra. Alors elle avança juste le bout de sa langue et la fit voltiger sur ce dôme luisant. Malou eut un frémissement. Cette salope savait y faire. La pipe augurait déjà d'autres plaisirs plus corsés. Derrière la porte du salon, des voix se faisaient entendre ; mais rien d'alarmant.


— Tu ne vas pas lui faire de mal ?
— À Maud ? Jamais ! Elle aime le cul, tu dois bien le savoir, mais elle se cherche encore un peu. Elle tâtonne, et sur son chemin il y a le doux – c'est toi – et le méchant : c'est moi.
— Drôle de manière de résumer, mais je crois qu'elle serait d'accord avec tes propos.
— Alors elle trouve dans chacun d'entre nous quelque chose qui lui est vital. Je pense pouvoir dire sans me tromper que si elle rencontrait un type qui lui donne ce qu'ensemble nous lui apportons, nous n'existerions plus. Un peu comme le sucré-salé en cuisine, tu piges ?
— Bien sûr. Mais c'est l'idée actuelle de partage que je réfute plutôt.
— Et alors ? C'est elle qui a raison ! Tu sais, de nos jours plus personne ne songerait à passer toute son existence chez le même patron ; et puis, au cas où tu ne lirais pas les statistiques, il y a de plus en plus de divorces. Je crois que si nous, les mecs, nous réagissions comme Maud, le monde s'en trouverait bien meilleur.
— Dur à avaler. Une idée à creuser… C'est vrai que je n'avais pas vu ça sous cet angle.
— Ne reste pas dans ta bulle de petit bourgeois trop sage. Regarde-la, elle ! C'est un exemple pour des types comme nous. Elle est belle, intelligente, et elle sait ce qu'elle veut. Tu paries qu'elle nous attend, à poil dans mon salon ?
— Tu n'es pas sérieux, là…
— Si ; et peut-être même qu'elle s'occupe de mon pote Malou. On va voir ? Tu ne deviendras pas fou furieux si…
— Non, ne t'inquiète pas, j'ai entendu et compris tes arguments.
— Alors, à toi l'honneur. Vas-y, pousse la porte.

La pipe s'éternisait, et Malou avait de plus en plus de difficulté à maîtriser sa bougie. Il était au bord de l'explosion quand la porte qui s'ouvrait vint à son secours. Alain qui entrait n'était pas seul ; un grand type l'accompagnait.

— Julien, voici Malou. Malou, c'est Julien, un autre amant de Maud. Mais un gentil, tu vois… Un masseur qui y met des formes. Pas comme toi et moi qui aimons le cul bourrin !
— Salut mec. Je peux continuer ? Il était temps que tu arrives, Alain, j'étais à deux doigts d'asperger cette jolie bouche. Tu aimes aussi les pipes de madame ?
— Euh… j'avoue, oui.

Maud avait tourné son visage vers les entrants. Elle semblait soudain satisfaite de voir que Julien n'était pas en colère. Il n'avait pas de traces de coups non plus, signe évident que personne ne s'était battu pour elle. Une désillusion tout autant qu'une satisfaction. Elle ne saurait jamais ce qu'avait pu lui raconter Alain. Le principal étant qu'ils soient tous là ensemble. Alors sans dire un mot, elle ouvrit de nouveau ses mâchoires et reprit son ouvrage là où elle venait de le stopper. Derrière elle, le bruit de deux fermetures Éclair avait gentiment glissé dans ses oreilles.

Entourée par ses trois amants tout aussi nus qu'elle, elle avait apprécié sucer l'un ou l'autre. À genoux parfois, sa bouche avait aussi flirté avec deux chibres simultanément. Puis Julien, couché sur le dos, l'avait attiré sur son ventre. Elle avait simplement chevauché son corps et s'était délicatement empalée sur la bite qu'il tendait vers sa chatte. Un long moment, sous les regards des deux autres, elle avait caracolé sur le pieu qui la remplissait. Quand deux mains bien fermes lui avaient relevé le visage, sans se faire prier elle avait happé la lance qui se présentait à sa bouche.

Enfin quatre mains lui avaient ensemble écarté les fesses, et Malou, très doucement, était venu plonger dans cet antre aussi sombre que sa peau. Elle avait gigoté sur deux bites comme un marin à la dérive, suçant par intermittence le troisième larron. Mais vraiment, le pied magistral qu'elle prit fut assurément impossible à retenir dès le début de la fessée que son enculeur lui donna. Chacun échangea sa place avec ses partenaires frénétiques. Elle fut ballottée par des coups de queue vigoureux, soulevée du sol par des bras puissants et cajolée par les mains douces de Julien.

Il n'avait à aucun moment donné sa langue au chat, sauf peut-être pour une minette savante. Quand elle le sentit qui passait sous elle pour la lécher, elle était prise en levrette par Alain. Elle n'arrêtait pas de frissonner, de gémir et de soupirer. Sa liqueur coulait sur le parquet, inondant les corps qui se roulaient dedans. Lors d'une halte, pause bien méritée, Julien était venu lui rouler un patin mémorable. Ce fut ce drôle de moment que choisit Alain pour venir tendre à la femme sa verge à sucer. Le baiser n'était pas même terminé que la langue de Maud courait sur la tige turgescente. Le masseur n'eut pas le réflexe de se reculer, et la sienne aussi effleura le vit qui coulissait maintenant entre les dents de la brune.

Elle plaqua simplement ses deux mains sur les cheveux du kiné qui saisit de suite qu'il pouvait lui aussi câliner cette chose que pour la première fois il voyait de si près, et il apprit là à faire ce que la bouche de son amie réussissait si bien. Il se rendit compte qu'il était simple de prendre goût à ce genre de… raffinement.
Après eux la Terre tournerait encore. Alors, pourquoi ne pas en profiter pleinement ?

Maud avait raison. Alain avait raison. Et il ne lui restait plus qu'à se rallier à leur cause, celle des libertins convaincus. Ce qui était fait ne serait plus à faire…