Les sœurs de Mouillépartansec

C'est ainsi que les moniales se rendirent, cornettes au vent, jusqu'à la sinistre abbaye de Ker Ozen. Impressionnées par l'imposant édifice, beaucoup gardaient le silence. Seule la Mère Cure conversait avec la Mère Ciboulette en lui prodiguant divers conseils sur les régimes pour garder la ligne.

Le Père Plex accueillit les religieuses et les conduisit jusqu'au cloître où l'on était en train de préparer la croix du Père Igor pour sa crucifixion nocturne. Celui ci s'allongea sur le morceau de bois et se laissa attacher selon un rituel qui, désormais, était bien établi. Mais lorsque les sœurs découvrirent le phallus dressé, elles ne purent retenir un cri d'admiration en voyant ce mât du diable, ce mât démon pour certaines, ce mât divin pour d'autres.

La Mère O'Vingienne, une solide religieuse irlandaise, s'opposa fermement au Père Pandiculair pour que la croix fût redressée puis, sans autre forme de procès, troussant sa robe et s'installant à califourchon au-dessus du Père Igor, elle s'empala profondément sur cette bite offerte tel un don du ciel. Elle s'agitait sur ce membre telle une bacchanale déchaînée, contractant ses muscles intimes, faisant de lents va-et-vient sur cette colonne de chair en lançant de gutturaux « My God ! Ooh ! My God !… » Rapidement terrassée par un fulgurant orgasme, elle fut remplacée par une autre sœur qui prit sa place tandis qu'elle tentait de reprendre peu à peu ses esprits contre un des nombreux piliers du cloître.

Oubliant toute retenue, les nonnes se dénudaient, se bousculaient même pour pouvoir à leur tour venir s'empaler et goûter au sexe du Père Igor. Poussant ses consœurs en voulant se trouver le plus près possible, la Mère Ick n'arrêtait pas de dire « Je veux la voir et je l'aurai ! » Quand son tour arriva, elle ne se fit pas prier et prit longuement son pied. Après un premier orgasme, elle n'hésita pas – malgré les grondements d'impatience de celles qui attendaient leur tour – à se sodomiser avec ce membre qui, malgré les assaut répétés, ne faiblissait pas, jusqu'à procurer un double plaisir à la Mère Ick, pourtant puritaine dans la vie.

Cela tournait à la partouze générale ! Le Père Nau et l'Abbé Nezdictine faisaient la navette entre la cave et le cloître afin d'abreuver avec de bonnes bouteilles tous ces religieux avides de sexe et d'alcool, qui avaient plutôt rapidement balancé soutanes et cornettes aux orties.

À Ker Ozen, elles avaient le feu au cul, les nonnes après autant de mois – voire d'années pour certaines – de privation (les doigts, les cierges, les manches à balais, concombres et courgettes ne servant que de pauvres ersatz à leur exutoire). C'était à laquelle se montrerait la plus entreprenante pour collectionner le plus de bites de moines. À ce petit jeu, la Mère d'Houilles et sa sœur jumelle, la Mère d'Heuze, rivalisaient d'ingéniosité, suçant dévotement des sexes ramollis pour leur redonner vigueur, fermant les yeux, proches de la béatitude comme si elles venaient de recevoir l'eucharistie. Sous les caresses buccales de ces ogresses, le Père San ronronnait de plaisir.

Sœur Vie d’Ange s’activait de Père en moine ; en bonne pompeuse, elle était bien décidée à éponger tout Ker Ozen, et ses consœurs n’avaient pas besoin de lui demander « TVATVA : Tu Veux Avaler  ? » pour qu’elle se gave, telle une oie, de ces précieux nectars ; l'abbé Nallah lui aurait bien fait son affaire, mais retenu par des ennuis de santé, il n'avait pu se rendre à Ker Ozen.

On forniquait aux quatre coins du cloître ! La Mère Demol offrait son cul de manière éhontée, réclamant moult sodomies. Le Père Seur enfilait profondément la Mère Seri pendant que le Père Dant, qui avait oublié son dentier, léchait goulûment la moule de la Mère Dauman. Dans un autre coin, le Père Formant prenait en levrette la Mère Délorore ; même le Père Plex avait fini par se joindre avec la Mère Cibocou à cette furieuse orgie, et ils n'étaient pas les derniers à goûter tous les plaisirs des sens que leur offrait Ker Ozen.

Un peu à l’écart, les inséparables Sœurs Siamoises, chattes offertes, mettaient en pratique un vieux manuel : La CSGCSG : Comment Se Gougnotter pour les nonnes.

Peu à peu, repus et ivres, tous finirent par s'endormir sur le sol de marbre dans un enchevêtrement de corps, laissant sur sa croix le Père Igor, qui malgré les nombreuses éjaculations produites par l'impressionnante quantité de moules venues s'empaler sur lui, restait le sexe dressé. Il s'endormit à son tour, épuisé et incapable de prononcer les paroles magiques qui auraient pu hâter sa transformation en loup.

Au petit matin, alors que le Soleil commençait à poindre à l'horizon, les sœurs, après avoir repris une tenue plus respectable, regagnèrent leur couvent de Mouillépartansec tout en se promettant de multiplier leurs échanges avec les moines de Ker Ozen.

Après cette première nuit de débauche, les sœurs de ce couvent prirent l'habitude de se rendre chaque samedi pour une soirée orgiaque à l'abbaye de Ker Ozen. Les villageois qui croisaient cette lente procession hebdomadaire sur le chemin de l'abbaye étaient surpris de voir ces religieuses faire preuve d'autant de foi en les entendant réciter leur chapelet et en entonnant de temps en temps quelques cantiques. S'ils avaient su qu'elles s'y rendaient pour participer à une communion de la chair totalement débridée, ils en seraient tombés des nues.

Dès leur arrivée, elles ne perdaient pas de temps en futiles présentations et autres salamalecs : après s'être dévêtues et avoir accroché leurs vêtements à la longue planche couverte de clous Schlomo mise en place par l'Abbé Névol, elles fonçaient nues vers le cloître où, attaché sur sa croix et le sexe toujours érigé, le Père Igor ne pouvait que subir les assauts de ces femelles en chaleur qui, après leur semaine d'abstinence, se déchaînaient. Les braves Pères de l'abbaye se joignaient, sans se faire prier, à cette partouze qui devenait bien organisée, avec victuailles, boissons et musique. La Mère Cure mettait de l'ambiance et faisait monter la température de quelques degrés sous la voûte du cloître.

La Mère MacDonald aimait bien se faire prendre en sandwich. En raison de ses origines écossaises, elle jouait souvent des airs de cornemuse ; mais entre deux morceaux elle délaissait volontiers les tuyaux du bagpipe pour engamer des tubes de chair gonflés de désir, et son adresse buccale forçait l'admiration de ces mâles en rut. Certains, après être passés dans sa bouche, avaient l'impression d'avoir subi un véritable essorage et ne savaient même plus à quel saint se vouer.

La Mère Itagricol frottait son opulente poitrine – ou plutôt ses lourdes mamelles aux tétons gros comme le pouce – contre la statue de saint Serge, saint figé dans la pierre plus habitué à recevoir des prières que des caresses de seins de chair. Elle se mit à pousser de véritable meuglement de plaisir quand le Père Forateur entreprit de la sodomiser avec le lourd goupillon de bronze destiné à bénir la foule lors des grandes cérémonies.

Un peu à l’écart, l’Abbé Habat, en compagnie du Père Séver, initiait la paresseuse Mère Detoulévisse aux plaisirs masochistes. Elle s’était laissé attacher passivement à l’un des piliers du cloître et recevait en alternance sur son postérieur les coups de martinet et de cravache que lui donnaient les deux pères. Les fesses rougies et marquées par endroits, elle gémissait de plaisir, se mordant les lèvres pour ne pas hurler de plaisir ; elle sentait son humidité couler le long de ses cuisses et aurait bien voulu, à cet instant, être prise sauvagement. Ses bourreaux l’entendirent, dans un souffle, dire « Amène ! » mais n’en comprirent pas le sens.

Pour mieux exciter les moines, la Mère Loque s'était parée de sous-vêtements affriolants. Lorsque les bons Pères la virent ainsi, leur désir atteignit son paroxysme, et ce fut une course effrénée pour récupérer un bas, le porte-jarretelles, le string ou le corset, se battant même jusqu'à ce que les précieux dessous se retrouvent en lambeaux. Finalement, ils délaissèrent le tas de guenilles pour combler ses différents orifices.
Un peu à l’écart, le Père Laipaidal ahanait avec beaucoup de conviction entre les reins du pauvre Père Laboul.

Au comble de l'ivresse, les moines entonnaient dans une cacophonie avinée des chansons paillardes, dont celle ci :

Les hommes de Loctudy
Ont écrit une lettre à monsieur le curé :
Curé, curé,
Curé on vous en prie,
Les filles de Loctudy, il faut qu'on les marie.
L'curé n's'est pas dégonflé,
Et en chaire il a prononcé :
Jeunes gens, jeunes gens,
Jeunes gens, je vous en prie,
Les filles de Loctudy, il faut qu'on les marie.
Les jeunes gens ont répondu :
Les filles de Loctudy, nous n'en voulons plus :
Nous préférons les belles Guilvinistes ;
Les filles de Loctudy ont toutes la chaude pisse.
Nous préférons les filles de l'autre école :
Les filles de Loctudy ont toutes la vérole !

[Bribes d'un chant de marins que l’auteur du texte ne retrouve plus.]

Le Père Duhanmer était bien seul au milieu de cet océan de débauche. Il avait beau multiplier les appels de détresse, rien n'y faisait, et il voyait ses coreligionnaires sombrer peu à peu dans le stupre et la luxure. Ce n'étaient pas les œillades énamourées que lui lançait la Mère Lanfri qui le détourneraient du droit chemin ; et même s'il se contentait de regarder cet enchevêtrement de corps et ces accouplements bestiaux, il avait décidé de ne pas participer.

Peu avant que l'Angélus du matin ne sonne, la Mère Itémissahest se chargea de faire rhabiller les sœurs, et le café brûlant servi par le Père Colateur leur permit de reprendre avec un air plus digne la route de Mouillépartansec.

Après toutes ces agapes, le Père Plex ne pouvait que se rendre à l'évidence : le Père Igor ne débandait pas ! Le phénomène devenait étrange, car depuis le temps qu'il avait ingurgité la tisane du Père Cil, elle aurait dû ne plus lui faire d’effet depuis longtemps. Au sein de la communauté monastique personne n'était capable de fournir une explication rationnelle ; quant aux sœurs du couvent voisin, ce sexe érigé en permanence convenait parfaitement à leur bonheur, et si elles avait pu ramener le Père Igor et sa croix au couvent, elles ne se seraient pas privées d'être comblées quotidiennement.

Comme cela devenait vraiment mystérieux, le Père Plex, après de nombreuses hésitations, se décida à contacter le Supérieur de la petite communauté bouddhiste qui s'était établie non loin de là.