5. Judith, ou les joies de la vie de famille

Vingt fois, cent fois peut-être Judith a rappelé à Stéphane de ranger sa chambre. Rien à faire. Un vrai capharnaüm qui la rend malade encore ce matin. Le jeune homme, brillant dans des études de droit, se fiche totalement de la vie en communauté. Il oublie un peu vite que c'est elle qui range ses affaires, nettoie, astique, passe son temps à entretenir l'appartement dans lequel ils vivent tous les deux. Il dépasse les bornes, et elle est bien décidée à lui faire la morale une fois de plus. Mais pour cela, elle doit attendre qu'il rentre de ses cours.

Naturellement, Judith en a marre de répéter à longueur de semaine des paroles dont le gaillard ne tient jamais compte. Il vit avec elle depuis le début de la nouvelle année scolaire. À vingt-six ans, la petite rousse est la sœur aînée du loustic que ses parents lui ont finalement imposé. Pour qu'ils assument les charges et son quotidien, le temps des études de leur fils bien-aimé, le deal a été clair. Nancy et Franck se sont montrés intransigeants : elle doit vivre avec Stéphane dans l'appartement qu'ils ont acquis pour leurs enfants dans cette banlieue.

Celui-ci est confortablement meublé et agréable avec ses quatre chambres, sa salle de bain et une cuisine où la jeune femme passe du temps. Elle est également en dernière année de ses études. Dès l'année prochaine, elle devrait être interne au CHU local. Son frère, de quatre ans son cadet, est donc tout naturellement venu s'installer avec elle dans une des chambres libres de cet espace perdu en pleine verdure, à moins de dix minutes à pied de leur lieu d'études. Un privilège inouï pour ces deux jeunes nantis.

Par contre, autant la jeune fille est pointilleuse sur l'hygiène et la propreté, autant son fichu frangin se tape du rangement. Il ne veut que bosser ; le reste n'est qu'accessoire et fioritures dans son esprit. Son but dans la vie ? Être avocat comme papa pour reprendre le flambeau. Alors, que sa frangine râle le laisse indifférent, ce qui amène Judith à remettre de l'ordre dans la chambre aussi du frérot. Les chaussettes sales, les calbutes qui traînent, ça fait mauvais genre. Comme elle va faire une lessive, autant laver aussi le linge du drôle qui n'est même pas capable de le mettre dans la panière de la salle de bain. Alors, avant de passer un coup d'aspirateur pour nettoyer, elle doit un minimum ranger ce qui jonche le sol.

Ce faisant, après avoir ramassé les effets à laver, ceux à replier, et remis de l'ordre dans la chambre de son frère, elle retape un peu le lit. En redressant l'oreiller, elle fait une découverte inattendue : camouflé entre la tête de lit et le mur, un bout d'étoffe violette est tiré de sa cachette. Judith prend le truc ; visiblement, il s'agit d'une culotte de femme. Jusque-là, ça peut sembler normal. Ce qui l'est sans doute moins, c'est qu'il s'agit d'une des siennes ! Et sur la dentelle délicate de ce fin triangle, des taches suspectes dont la provenance n'est pas aussi indéterminée que cela sont bien visibles.

Les doigts de la jeune femme qui frottent les endroits souillés sont humides. Machinalement, elle les porte à ses narines. Le doute n'est plus permis : ce saligaud de Stéphane se branle dans ses culottes ! Un comble, tout de même… Merde alors, il va donc piocher dans ses affaires. Puis en la retournent sous toutes les coutures, elle doit se rendre à l'évidence : il s'agit de celle qu'elle portait avant-hier.

L'objet retrouvé regagne la place qu'il devait occuper quelques heures plus tôt, le panier de linge sale. Puis, comme elle s'est englué les doigts dans la semence fraîche de son frère, elle en profite pour se laver les mains. En pestant bien sûr contre ce jeune coq qui ne trouve rien de mieux à faire que de fantasmer sur ses dessous. Elle sait bien qu'à son âge c'est naturel de se masturber ; mais de là à lui voler ses slips… La jeune fille sait déjà qu'elle n'osera pas non plus aborder ce sujet avec lui.


L'amphi se vide lentement tandis que Stéphane discute encore avec deux des étudiants avec qui il partage les bancs. Entre lui et ces deux-là, c'est un peu à la vie, à la mort. Ils sont comme lui un peu paumés, un peu seuls aussi. Encore que Stéphane soit privilégié puisque sa frangine vit dans le même appartement. Il bénéficie donc d'une sorte de continuité de vie de famille. De plus, si Judith est stricte – pour ne pas dire chiante – sur pas mal de points, elle ne se préoccupe pas de ce qu'il fait en dehors de leur espace de vie commun.

Il faut reconnaître que Judith, de quatre ans plus vieille que lui, est plutôt bien roulée. Parfois, souvent même, il regrette qu'elle soit sa sœur. Il rêve de se la taper et il lui arrive de fantasmer sur elle. Il ne s'en ouvre pas à ses copains, mais s'il osait… il tenterait bien sa chance, une fois, pour voir. Maxime et Loïc, les deux compères avec qui il passe le plus clair de son temps en dehors du cocon familial imposé par ses parents, ont chacun une petite amie. Alors il s'invente des histoires de fesse pour frimer un peu.

Un soir que Judith et lui rentraient des courses, Maxime les a aperçus, ce qui a donné un crédit sans faille à ses récits plutôt croustillants, se voulant les rivaux de ceux de ses amis. Loïc, lui aussi, narre parfois des aventures débridées vécues avec une certaine Sylvette que personne n'a jamais croisée. Le troisième larron ne veut pas parler cul, et encore moins raconter ce qu'il fait en compagnie de sa Bettina. Les deux autres sont donc persuadés que la belle fille rousse est la copine attitrée de leur pote.

Les mains se serrent avant que chacun prenne le large, et Stéphane retourne vers sa chambre. À son retour, Judith est à la cuisine. Elle a travaillé tout le matin dans le service de pédiatrie de l'hôpital où elle sera bientôt médecin si tout va bien pour elle. Pour l'heure, le dîner se prépare sous ses mains douces. Un rapide bisou de son frère sur la joue et elle replonge dans ses occupations. Lui se dirige vers son île. Tout de suite, il sait que sa frangine a fait une incursion dans son antre : tout est bien en place, les fringues sales ont disparu, et le lit est tiré.

Il se colle le nez dans un Code pénal et oublie le reste. Une petite heure plus tard, les odeurs de cuisine le dérangent, et pour que son estomac ne réclame pas trop fort, il tire la porte. Puis, pour faire un break, il ouvre sur son ordinateur portable un de ces sites un peu légers où des femmes toutes plus belles les unes que les autres font des trucs dont tous les hommes rêvent. Naturellement, le résultat est plus que probant, et ceci très rapidement. La porte fermée lui procure la discrétion dont il a besoin.

Sur l'écran, la fille a des cheveux roux. Simple coïncidence ? Pas si sûr, parce que depuis un moment Stéphane est obnubilé par sa grande sœur. Celle sur l'écran a la langue agile et le feu aux fesses. Sur les images qui défilent, ce n'est qu'une partie de sexe débridée, et la violence des clichés est si forte qu'au bout d'une minute le jeune homme ouvre sa braguette. La tige qui émerge du slip se cale parfaitement dans le creux d'une main qu'un poignet leste agite frénétiquement. C'est rapide. C'est court. Le Kleenex finit de torcher les gouttes éparses d'un lait crémeux.


Judith a vu son frère rentrer plus tôt que d'ordinaire. Après la bise usuelle marquant leur fraternité, il a bien vite gagné sa chambre. La porte non close, lors de plusieurs coups d'œil, elle l'a trouvé occupé sur son grand livre rouge : le Dalloz est depuis longtemps son unique livre de chevet. Alors, affairée à cuisiner un bœuf bourguignon et de la purée pour une dînette en tête-à-tête, elle n'a pas entendu la cloison de bois se refermer. Lorsqu'elle s'en rend compte, elle se demande bien pourquoi Stéphane a besoin d'intimité.

Quelque part, l'histoire de sa petite culotte maculée de semence revient comme un éclair un soir d'orage. Rendue curieuse, elle se déplace sur la pointe des pieds. Il n'y a que peu d'espace entre la cuisine et la piaule de son frérot. S'il a pris soin de tirer la porte, il n'a pas pensé à tourner la clé dans la serrure. Et le spectacle par le trou de celle-ci est édifiant : assis devant son ordinateur, le gaillard astique une queue qu'elle devine plus qu'elle ne la voit. Les écouteurs sur les oreilles, il semble lire une vidéo intéressante.

La jeune fille reste de longues secondes à suivre la course de la pogne qui monte et descend, puis la fusée blanchâtre qui jaillit pour ensuite disparaître dans un mouchoir jetable ; elle se sent humide de partout : avec sa branlette, ce petit con lui a mis le feu au derrière. Toujours sur son siège, il continue de masser généreusement ce manche qui vient pourtant de pleurer. Judith ne sait plus trop quoi faire. Elle aimerait bien elle aussi se caresser, mais sur la gazinière sa popote mijote. Elle reflue discrètement vers la cuisine.

Une heure plus tard, la table dressée, Judith appelle son frère :

— Stéphane, tu veux bien venir ? Il est temps de passer à table, le dîner est prêt.
— J'arrive !

Il a répondu, et c'est vrai qu'il se présente rapidement pour se glisser les pieds sous la table. Elle l'arrête d'un geste.

— Tu ne veux pas te laver les mains ?
— Ah oui, zut !

Il s'est redressé et la regarde curieusement. Aurait-elle senti l'odeur du sexe sur ses doigts ? Ce n'est pas possible, elle est trop loin de lui. Non, c'est encore sa sacro-sainte horreur de la saleté. Il s'exécute pourtant. Elle s'écarte de l'évier, et une noix de savon liquide au creux de sa paume, il se passe les pognes sous la flotte. Judith est vêtue d'une robe rouge qui laisse ses bras découverts ; sa poitrine tend le tissu au niveau des seins qui attirent le regard du garçon. Il rougit de sentir sur lui les yeux de sa sœur. Elle ouvre la bouche pour parler, puis y renonce presque immédiatement.

L'un en face de l'autre, ils dînent en silence. Un silence qui devient pesant. Ce mur qui se crée entre eux est soudain troué par Stéphane, qui d'une voix neutre laisse tomber une banalité :

— C'est bon… Tu cuisines aussi bien que maman.
— Oui ? Merci. Et je fais le ménage aussi bien qu'elle, non ? Dis-moi, quand vas-tu te décider à grandir ?
— Pourquoi me dis-tu cela ?
— Parce que je ne te demande pas la lune. Juste de mettre ton linge sale dans le panier à lessive. C'est encore trop te demander ? Je n'ai pas envie de jouer la bonniche.
— Je te promets de faire un effort. Au fait, tu rentres vendredi à la maison ?
— Non, je suis de garde samedi matin. J'ai prévenu les parents. Et toi ?
— Ben oui. De toute façon, Loïc et sa Sylvette seront chez eux ; je suppose que pour Max et sa Bettina, ce sera pareil. Mais toi, Judith, tu n'as donc pas de petit copain ?
— Non. J'ai déjà fort à faire : c'est ma dernière année, et ça ne rigole pas. Et puis l'appartement…
— Tu devrais bien prendre un peu de temps pour toi, tu sais… Tu as raison ; je crois que je serai plus vigilant à partir de maintenant. Nous ne discutons presque jamais, toi et moi. Tu es devenue une belle jeune femme ; je ne peux pas croire que pas un garçon ne s'intéresse à toi ; dans le milieu hospitalier…
— Arrête, Stéphane ! C'est un mythe, les infirmières nues sous leur blouse ou les femmes médecins qui tripotent leurs patients pour le plaisir, pas plus que les avocats ne couchent avec leurs clientes : déontologiquement, c'est interdit. Et puis je n'ai guère de temps pour les flirts ou la bagatelle. Chaque chose en son temps ; je me rattraperai.
— C'est dommage de perdre du temps… à t'occuper de moi et de cet appart. Sors au moins une fois de temps à autre ; va en boîte, fais-toi plaisir, bon sang !
— Tu peux parler, toi… À part tes deux potes Maxime et Loïc dont j'entends toujours causer et dont je ne vois jamais les bouilles, tu fréquentes qui d'autre ? Leurs petites amies sont comment, hein ?

Bien incapable de répondre, le jeune homme aide pour une fois sa sœur à desservir et il place lui-même les couverts dans le lave-vaisselle. Elle le regarde, médusée.

— Eh ben… il va tomber quoi ? Ce soir est à marquer d'une pierre blanche sur le calendrier.
— C'est ça, fous-toi de moi ! Tu vois, quand je veux te donner un coup de main…
— C'est que tu ne m'y as guère habituée.
— C'est vrai…

Il s'est retourné vers Judith. En passant l'éponge pour nettoyer la table, sa main heurte par inadvertance un sein qui avance un peu sur le tablier de bois.

— Pardon. Je…
— Ça va, tu n'as pas fait exprès.
— J'aurais peut-être dû…
— Quoi ?
— Ils ont l'air beaux et fermes. Tu es une belle gonzesse et tu le sais bien.
— Tu dérailles ou quoi ? Je te rappelle que tu es mon frère.
— Un frère, c'est aussi un homme et une sœur reste une femme, il me semble.
— Je ne veux rien entendre d'autre, d'accord ? Tu n'as jamais prononcé ces mots-là. Et puis à ce propos, tu ne voles plus non plus mes culottes dans le panier !
— Ah, tu sais ?
— J'ai refait ton lit, et je l'ai trouvée. C'est normal que tu passes tout seul tes envies, mais évite mes fringues.

Stéphane est devenu tout rouge. Il semble honteux de s'être fait prendre la main dans le sac.

— Pourquoi tu n'invites jamais tes amis et leurs copines ?
— Je dois te faire un aveu : ils me prennent tous pour un jeunot.
— Oh, ça passera, ça, quand tu auras toi aussi un flirt.
— À ce propos, je leur ai dit que je vivais avec ma petite amie ; et comme l'un d'eux un jour nous a aperçus alors que nous faisions les courses… je n'ai pas démenti.
— Tu es malade, mon pauvre ! Ils vont bien savoir un jour ou l'autre.
— Tu ne vas pas me faire passer pour un con au moins ?
— Pff, l'esprit tordu ! Méfie-toi, Stéphane, ça te jouera des tours. Bon, puisque tu as débarrassé, je vais prendre ma douche. À tout à l'heure.
— Ouais, tu ne veux pas que je te frotte le dos ?
— Idiot ! File, sale type ! Allez, disparais dans ta chambre !

La caresse de l'eau est un bienfait dont elle ne se prive pas. Finalement, ses mains font un voyage initiatique au pays des monts et des merveilles. Dans la cabine vitrée, le gel odorant recouvre la peau sous des millions de bulles délicates. Équipés d'un gant en éponge, les doigts vont et viennent, n'épargnant aucun recoin de cette anatomie féminine qui se révèle demandeuse. Un buisson entretenu attire l'œil par une couleur aussi particulière que celle des tifs de la demoiselle qui se débarrasse de toutes les impuretés d'une longue journée : Judith est une vraie rousse.

Ses prunelles d'un vert émeraude lui donnent un regard particulier. Mais contrairement à ce que pensent beaucoup de gens, il lui semble que les hommes ne sont pas attirés par cette beauté différente. Alors les paroles de ce frère plus jeune, si elles lui ont fait plaisir, ont également réussi à réveiller chez elle une envie qui ne demande qu'à éclore. À son âge, elle est toujours vierge ; pas par goût, pas par acharnement à trouver le bon mec, non. C'est juste que personne ne lui a tapé dans l'œil, et surtout qu'elle n'a jamais vraiment été draguée par un type, ou du moins assez assidûment pour se laisser faire. Et le simple fait de savoir que Stéphane se soulage dans ses culottes, ça la chatouille un peu. Alors elle se sert de ses mains, là sous la douche, pour se faire du bien.

C'est assez puissant pour que les images qui tournent en boucle dans sa tête soient suffisamment suggestives. La scène de masturbation remonte derrière son front avec force. Survient donc par paliers successifs une montée d'un désir trouble qui va crescendo jusqu'à son terme en apothéose jouissance. Ses muscles se tétanisent puis tremblotent de partout alors qu'elle ne peut retenir un cri. Heureusement que l'eau en masque un peu la puissance ; pourvu que Stéphane n'ait rien entendu. Enfin, est-ce vraiment une chance ? En cet instant, la femme en elle est plus présente que la sœur. Pour un peu… elle réagirait d'une manière insensée.

À peine sortie de l'eau, elle sèche ce corps qui d'un coup lui paraît bien pesant. Son orgasme n'a soulagé que la chair, pas l'âme. Sa coiffure avec ses cheveux mi-longs lui prend plus de temps ; elle l'emmaillote dans une serviette à « la fakir » puis passe une crème de soin raffermissante sur son épiderme. Pour finir, une nuisette affriolante cache tous ces trésors dont personne ne s'est encore servi. Une bouffée de parfum aux senteurs exotiques, expulsée par un vaporisateur, vient enrober l'ensemble.

De nouveau, elle vaque dans l'appartement. Il lui faut préparer ses vêtements pour demain. Blouse blanche stricte sur un tailleur tout aussi sobre, une paire de collants plus facile à porter que des bas, et des sous-vêtements bien pliés et parfumés : voilà de quoi passer le reste de la soirée l'esprit libéré des contraintes matérielles du lendemain. Reste un temps relativement libre à mettre à profit pour suivre un bon film peut-être à la télévision. Et quoi de mieux que le vaste salon aménagé de cet appartement pour cela ?


Le jeune homme a rangé la cuisine ; du coup, il a l'impression d'avoir fait quelque chose de surhumain. Tout fier, il regagne sa chambre. Sa frangine est sous la douche, le bruit de l'eau qui coule en atteste. Allez savoir pourquoi la pensée que le corps nu de celle qui reste tout de même une nana vient lui titiller l'esprit. Il l'imagine et se demande si… oui, c'est con et il le sait, si sa chatte est ornée de poils roux. Il y a tant de rumeurs qui courent sur les femmes qui portent des chevelures flamboyantes !

C'est de toute façon une vraie rousse. Même ses yeux sont verts comme ceux des chats. Il en a souvent plaisanté avec elle. À force de songer à ce cul qu'elle promène dans des fringues serrées dans ce lieu où ils cohabitent, sa gaule est revenue. Elle ne fait rien, c'est sûr, pour l'aguicher. C'est seulement son esprit de mec tordu qui remet le couvert. Merde ! Si ça continue, il va finir par se branler vingt fois par jour en se remémorant le popotin de sa frangine ! Et dire qu'il ne l'a pas même aperçue à poil…

Il se retrouve dans sa piaule avec sa quille à la main. D'instinct, il commence un va-et-vient forcené, mais dans sa caboche quelque chose lui dit de ne pas aller jusqu'au bout, de se calmer. Il ne va quand même pas devenir un onaniste convaincu, non mais ! Histoire de se vider la tête plutôt que les burnes, il décide d'aller voir si la télé ne diffuserait pas un bon film. Dans la salle de bain, la lumière est toujours allumée, signe que Judith s'y trouve encore.

Le salon est là sur la gauche. L'appart est bien meublé par papa et maman qui ont veillé à ce que leur progéniture ne manque de rien. Un canapé trois places et deux fauteuils qui l'encadrent font face à un immense meuble bibliothèque au milieu duquel un téléviseur dernière génération dort pour l'instant. La box assure Internet partout dans la maison, wi-fi oblige. Muni de la télécommande, l'apprenti avocat débute un zapping censé lui permettre de découvrir le programme idéal pour une soirée de détente, et c'est sur un truc un peu vieillot que s'arrête son choix : Dany Boon en facteur de choc donne la réplique à un Kad Mérad désopilant.

Le générique de début se déroule sur l'écran avec une petite musique de fond. C'est l'instant que choisit Judith pour, elle aussi, débarquer dans le salon.

— Tu as choisi quoi ?
— Un truc marrant, mais on peut changer si tu veux.
— Le titre ? Bon sang, dis-moi le titre au moins.
— Bienvenue chez les Ch'tis.
— Bon, au moins on n'aura pas à se forcer l'esprit pour comprendre. C'est du réchauffé, mais ça me va.
— D'accord. Ça va juste commencer. Tu te mets où ? Sur le canapé, ou bien tu prends un fauteuil ?
— Peu importe : à mon avis, je vais m'endormir dans pas longtemps.
— Prends le divan, tu pourras étendre tes guibolles.

Elle le trouve soudain bien prévenant, mais c'est sympa qu'il le soit. Elle s'installe donc au milieu de la longue assise du siège de cuir couleur crème, puis elle replie ses deux jambes sous ses fesses, tirant sur sa nuisette un peu courte pour la garder sur ses genoux. Stéphane colle son derrière sur le fauteuil qui est à sa gauche. Les images défilent, et l'acteur qui joue se retrouve dans une position délicate suite à une série de mensonges. À la dérobée, le garçon jette un coup d'œil vers sa sœurette qui bâille déjà.

La serviette qui lui enturbanne la tête est appuyée contre le dossier du canapé. Sous la fine étoffe légèrement transparente, il devine la poitrine qui la tend à chaque respiration. Ses seins laissent entrevoir une pointe marquée dans le tissu peu épais. Et du coup, le calme relatif du garçon est de nouveau perturbé par l'imagination de ces nichons haut perchés. Et fatalement, chez lui, c'est toujours sous la ceinture que se déclare le séisme. Il pose sa main sur sa braguette, pensant sans doute masquer la déformation de l'endroit.

Ça ne sert finalement à rien puisque Judith a déjà fermé les volets de son regard clair. La bouche entrouverte, elle laisse échapper de petits sons bizarres à chacune de ses inspirations. Si en plus elle se met à ronfler… mais non, le bruit se calme, et dans sa demi inconscience elle étend complètement ses cannes sur le divan, amenant sa tête sur l'accoudoir proche du fauteuil occupé par son frère. Elle bâille une fois de plus, étirant son corps telle une chatte.

Si les actions du film continuent leur petit bonhomme de chemin sur l'écran, le garçon, lui, ne suit plus rien d'autre que la forme allongée sur le sofa. La nuisette est suffisamment remontée pour qu'il devine l'absence de sous-vêtements. Et puis les seins ronds qui se dessinent à présent sur le devant du trop court négligé qu'ils compriment… c'est fou ce qu'elle est attirante ! Elle ne ronfle plus, mais semble ronronner doucettement. Que se passe-t-il dans la tête du jeune homme ? Devant lui, cette forme alitée n'est plus rien d'autre qu'une femme.

Lentement, il décolle ses fesses de son siège, se penche en avant et finit par se relever complètement. Puis il s'agenouille devant le lit improvisé où dort Judith. Il ne bouge pas, restant de longues minutes à observer ce corps de rêve totalement relâché. Oh, il y mettrait bien les mains, la bouche ; une furieuse envie de l'embrasser lui monte au cerveau, mais il lui reste un zeste de pudeur, une peur de se faire incendier si d'aventure elle se réveillait. Alors il se contente de ce qu'elle offre, bien involontairement peut-être.


Le son et les images se perdent dans le dédale d'une cervelle féminine fatiguée. Il fait bon, et Stéphane est calme sur son siège. Absorbé par la vision du film, il ne bouge pas. Judith sent que déjà le sommeil la gagne. Elle devrait aller se coucher, mais elle se trouve si bien là…

Elle est réveillée toute seule par son propre ronflement. Alors, sans réfléchir vraiment, elle s'étend sur le canapé que gracieusement le frangin lui a laissé. Sa tête vient se poser, proche du corps de son colocataire. Il ne fait pas mine de la voir. Du coup, elle referme ses quinquets et repose ses paupières.

Elle est bien, dans un monde pas totalement clos par le sommeil, mais pas non plus suffisamment en éveil. Elle sait – elle devine – le mouvement devant elle : une ombre qu'elle ne cherche pas à distinguer s'est accroupie face à sa couche provisoire. C'est drôle comme elle semble contente de se sentir moins seule… Elle ne bouge pas, mais ses sens pas vraiment endormis lui laissent entendre le souffle de celui qui s'est rapproché de sa place. Pourquoi ne réagit-elle pas alors que des gestes plus saccadés lui rappellent vaguement un autre moment de cette même journée ?

Il lui semble – mais dans son songe, elle est si bien – il lui semble, oui, que ce bras qu'elle imagine bouge de haut en bas, que la main masque une amplitude menant à un évènement marquant. Le souffle s'est juste un peu plus ajusté pour venir au centre d'elle. Elle se sent épiée, scrutée à la loupe, mais puisque c'est délicieux, pas besoin de s'énerver. Puis elle a chaud, terriblement chaud, et sa patte glisse sur le nylon du vêtement qu'elle porte. Derrière ses paupières, il n'y a plus de mouvements.

C'est sur sa poitrine que le vent court désormais. Un souffle qui ne tiédit pas et augmente encore la température de ce qui lui creuse le ventre. Alors, pourquoi hésiter ? Elle a besoin de toucher, de caresser ce ventre qui la démange. L'ourlet de son déshabillé est sur son nombril et elle se voit, touchant doucement ces flammes qui lui brûlent l'entrejambe. Lentement d'abord puis plus rapidement, elle laisse filer ses doigts dans des recoins entraînant des vertiges sensationnels. C'est trop top !

Quand donc a-t-elle la véritable sensation que sa main tient un truc bouillant ? Aucune idée ! Mais elle sait que son bras refait des gestes qu'elle copie sur certains aperçus plus tôt. C'est drôle comme l'impression de réel se fait place dans son esprit. Elle masturbe un sexe ; de cela elle en est certaine dans son songe érotique. Son ventre réclame de la bite et elle gémit doucement. Rien à faire, ça ne passe pas totalement. Elle a les yeux ouverts ou fermés ? Impossible à dire. Dans le noir, la réalité n'est pas probante. Elle se frotte sur ce qui est dur au centre de son corps. Elle crie, elle hurle même. Et c'est la délivrance.

Une main lui parcourt la fente qui suinte de bonheur. De nouveau une bouffée de chaleur l'envahit. Elle murmure toujours dans son sommeil :

— Baise-moi… caresse-moi. Oui, donne-moi du plaisir.
— …
— Prends-moi, fais de moi une femme. Oh, j'ai tellement envie… oui, touche-moi, vas-y ! Ne crains rien.

Elle vit ce qui se passe. La main est là qui la fouille ; un doigt qui la pénètre lui arrache pourtant un cri rauque. La patte reflue. Mais c'est pour mieux être reprise par les mains de Judith, qui la replaque de suite sur l'endroit qu'elle vient de quitter.

— Reste là ! Continue ta danse de sauvage ! Oui, donne-moi ce que j'attends. Ne t'inquiète pas de cette virginité dont je veux me débarrasser. Viens ! Je veux aussi goûter à ta queue ; tu veux bien, dis ? Tu es d'accord ?
— …

Elle se vautre sur le canapé, ses fesses rebondies se cabrent sous le doigt qui les frôle. Le mec n'a pas de visage. Ou plutôt si, il en a dix, vingt… cent. Il a toutes les gueules du monde. Et lentement elle jouit sous les assauts d'un sexe gorgé de sang qui la défonce tantôt lentement, parfois trop violemment. Elle revient à la charge par ses mots amoureux qu'elle veut crus et attirants :

— Ne t'arrête pas, prends-moi ! Oui, baise-moi comme personne ne l'a encore fait. Je veux être une femme, ta femme, pour un instant, une nuit, une minute, une vie. Je veux te sentir en moi. N'aie pas peur. Enfonce-toi en moi avec ça…

Sa main tient toujours le mandrin qu'elle attire vers elle à toucher sa chatte pour que l'engin s'y engage. Un premier coup de reins la fait plier et hurler. Puis le second qui, cette fois, accentue une douleur incompréhensible. Et enfin un rythme de croisière où le bien et le mal se mélangent en une seule sensation. Une émotion de se sentir enfin dépucelée, comme si l'hymen devenait à la fois étoile et soleil, nuit et jour confondus.

— C'est bon… n'arrête pas, n'arrête plus, plus jamais… donne… donne, donne-moi du plaisir !


À genoux devant le corps de sa sœur, Stéphane se masturbe doucement. Elle crie sans trop qu'il comprenne pourquoi. Le son de ses paroles ne couvre pas celui des acteurs du film. Le garçon tend l'oreille mais n'arrive pas à saisir le sens de ce qu'elle marmonne entre ses dents. Il arrête sa branlette, effrayé par les gémissements de la jeune femme qui fait visiblement un cauchemar. Mais les mains de Judith aussi font un étrange périple pour se rendre aux confins de son déshabillé. Il reste coi de la voir remonter le fin tissu.

Elle aussi se touche en gesticulant dans tous les sens et se recroqueville sur le sofa. Elle bouge dans une crise d'hystérie ressemblant fortement à une danse amoureuse. Elle rêve à quelque chose de très excitant, à en juger par ces déhanchements forcenés. Sa main tripote sa chatte surmontée d'un buisson enflammé et ses seins se soulèvent alors qu'elle braille des mots insensés. Stéphane ne bronche plus. Sa queue reste pourtant raide comme un piquet de pâture. Il ne tente pas de calmer ou de réveiller celle qui lui offre un étrange spectacle.

Les doigts de sa sœur griffent le bas de son ventre. Elle le soulève pour enfoncer en elle un index rageur. À aucun moment elle n'a cessé de marmonner des suites de phrases indéchiffrables pour l'ouïe de Stéphane, et ses phalanges tendues en guise de bite miniature s'enfoncent dans ce que le garçon guette avec insistance. De la chatte suinte de la mouille, et l'index semble être avalé par cette cavité humide. Judith hurle encore et encore. La dernière phrase devient plus compréhensible et le jeune homme croit comprendre « C'est bon… n'arrête pas, n'arrête plus, plus jamais… donne… donne, donne-moi du plaisir ! » mais il n'est certain de rien. Il se recule un peu, et la main qui revient de la cave a une petite tache de sang sur l'ongle de l'index. Merde ! Cette fois, elle va trop loin ! Il a peur qu'elle se fasse du mal. Il hésite, recule un peu plus et se rassoit sur son fauteuil. Sa sœur est désormais plus calme, mais son cou et en sueur. Alors il pose sa main sur le bras de la femme allongée.

— Judith… Judith, bon sang, réveille-toi !
— Hein ? Quoi ? Qu'est-ce qu'il se passe ?
— Je crois que tu as fait un cauchemar… Tu cries depuis au moins cinq minutes et tu t'agites dans tous les sens.
— Quoi ? Où sommes-nous ?
— Ben… dans le salon et nous regardons le film.
— Merde ! J'ai vraiment crié et rêvé ?
— Oui ; ça ne devait pas être si désagréable… Mais regarde ta main !
— Ma… main ?
— Oui. Tu as dû te griffer quelque part, tu vois… il y a un peu de sang sur le canapé.


— Vous croyez que vous saurez mettre mes mots par écrit ? C'est une histoire vraie que je viens de vous raconter là. Elle a eu lieu… en… j'étais bien jeune et bien con. Depuis, je me suis marié et mes deux enfants, Maryse et Bruno font leurs études. Eux ont par contre seulement deux ans d'écart. Et devinez quoi… eh bien ils cohabitent dans le même appartement que ma sœur et moi.
— Et Judith, elle ? Qu'est-elle devenue ?
— Regardez la télévision mercredi soir ; vous la verrez : elle passe dans une émission avec un de ses confrères cardiologue. Elle vit aux Etats-Unis, et est toujours célibataire. Je crois – elle ne l'avouera jamais – je crois qu'elle aime seulement les femmes.
— Merci de m'avoir reçue. Je vous fais parvenir une copie du récit en avant-première.
— Vous m'en donnerez un exemplaire pour Judith ? Je suis sûr qu'elle sera bien surprise de lire certains passages…
— Eh bien au revoir, Stéphane, et à très bientôt.
— Au revoir, et merci encore, Jane, de m'avoir écouté avec attention.