Les serments d'ivrognes

Après un vrai round d'observation, les choses ont évolué. Laure vient de refaire avec cette vendeuse pourtant bien jeune les gestes réappris la veille avec Marine. Bien sûr, sur ce divan il n'y a qu'elles deux et aucun homme pour se mêler à la joute amoureuse. Encore que le vocable « amoureux » ne semble pas s'appliquer à cette forme de rut, ce déchaînement de débauche. Et les lèvres retrouvent des endroits si semblables, dans des caresses si intimes qu'il est bien difficile de parler d'autre chose que de sexe pur. Les certitudes de la brune, ses beaux principes, ses remords quant à la tromperie faite à son mari s'oublient dans des mouvements si raffinés, dans des ballets d'une incroyable audace.

Lydie est aux anges. Elle profite de toutes les postures les plus délurées, s'empressant de répondre à chacun des baisers de feu de la femme mûre qu'elle a su attirer dans ses filets. Elle n'a que peu l'occasion de s'envoyer en l'air, et le faire avec une beauté comme celle qui est là, c'est un régal. Pour les yeux d'abord, puis pour les sens en éveil également. Les rituels qui apportent jouissance et bonheur s'enchaînent en de grands coups de langue, dans de longues caresses buccales. Les mains aussi sont à la fête, et ces quatre-là savent toucher juste.

Ce sont donc de savants effleurements, des attouchements tellement profonds et si délicieusement féminins que ni l'une ni l'autre ne voudrait que ça s'arrête. Mais après l'orgasme, les corps aussi se calment tout seuls ; et alors que d'une paume douce la jeune femme câline la joue de la plus âgée, les sens s'apaisent enfin. L'heure du départ arrive trop vite. Deux femmes se quittent après des serments d'ivrognes, ceux de se revoir. Chacune sait au fond d'elle-même qu'il n'en sera rien, mais ça ne coûte rien de se le dire.

La grande demeure vide, avec cette nuit le vent qui court dans le jardin et l'attente de Laure pour un coup de téléphone qui ne vient pas, font qu'elle tourne en rond. Pourquoi Gabriel n'appelle-t-il pas ? Depuis deux heures elle se tourne, se retourne dans son lit immensément froid de l'absence de son mari. D'autres idées lui traversent l'esprit. Des choses bizarres, incongrues. Et si… oui, si lui aussi s'envoyait en l'air avec des habituées de ces séminaires ? Sa façon à elle de se comporter depuis le départ de son homme déteint sur sa manière de voir la vie. Après tout, lui aussi reste un homme, et tout pareil à elle : il est donc faillible !

Impossible de dormir dans de telles conditions. De guerre lasse, la seule perspective acceptable est de se relever. Mais pas pour traîner dans la maison, non ! Un bain peut lui être salutaire. Le mitigeur ouvert sur une eau réglée à bonne température va lui permettre de remettre tout cela en place. Les sels de bain embaument la pièce close, et au bout de quelques minutes le niveau est suffisant pour que la brune se coule dans la mousse épaisse qui couvre la surface odorante. Elle prend si souvent des douches que la sensation agréable de la baignade lui apparaît plus sympathique encore.

Seuls sa tête et son cou émergent du liquide et elle ferme les yeux. Les milliers de picotements de la masse mouvante qui entoure son corps sont autant de caresses improbables qui la rendent plus calme. Elle savoure un long moment cette position allongée avec une perception de flottement de tout son être. Et sous son crâne, les images des jours passés défilent avec une lenteur inexplicable. L'amour avec le voisin, sa sortie en boîte avec ses amis, et puis cette rencontre avec une jeunette qui lui a montré que le sexe aussi peut se décliner uniquement au féminin, tout remonte avec force du plus profond de son esprit.

Sans s'en rendre vraiment compte, les images floues, distordues, qui reviennent à la charge sont autant de souvenirs agréables. Et ceux-ci éveillent ses sens, libérant dans son ventre une autre forme d'envie. Un besoin de se sentir frémir sous des caresses ; mais pour cela, elle ne peut que se satisfaire de ses mains. Ce qui arrive, bien entendu, c'est que tout d'abord sa poitrine aux tétons tendus par son envie reçoit la visite d'une paume qui, sous prétexte de les savonner, ne fait que les exacerber davantage. Puis les arabesques décrites par ses doigts sur la peau invisible sous la mousse se glissent vers ce centre qui espère tant d'attentions. Et les soubresauts de la femme allongée se transforment en petits gémissements, cris crevant le silence de la salle de bain.

Un index accompagné d'un majeur se lovent dans des endroits visités souvent depuis les départs de son mari par d'autres que lui. Elle se cabre tout entière sous la montée d'un plaisir solitaire. Loin de calmer sa faim, ce déchirement de son ventre n'ouvre en fait qu'une plainte longue et des gémissements à fendre son âme. La brune se tord sous les allées et venues de ces fripons qui lui massent langoureusement des lèvres entrouvertes. S'attaquant ensuite à ce bourgeon qui, comme les tétons, s'érige sous les bienfaisants passages des phalanges, elle jouit interminablement, solitaire mais heureuse.


Quelle heure est-il ? La lueur d'un jour bien avancé vient tirer des limbes d'une nuit prolongée la forme endormie. Laure s'étire comme une chatte. Son estomac lui rappelle qu'elle a faim. Le temps qui passe lui ramène toujours un peu plus près cet homme qui s'est éloigné pour une semaine. Et dire que tout s'est enchaîné sans vraiment qu'elle tente quoi que ce soit pour enrayer cette longue descente aux enfers… Aux enfers ? Plus elle y songe, moins ça lui paraît évident. Ou alors le diable avait de bien belles formes ; de jolies queues également. Ancré en elle, un certain malaise qui ne veut plus s'éloigner au fur et à mesure que Gabriel, lui se rapproche.

C'est après avoir pris un café et quelques tartines vers les seize heures que la sonnerie de la porte d'entrée la surprend une fois de plus. Sans courir, elle se rend au visiophone. Son jeune voisin est là. Sa main tient quelques fleurs et il attend sagement.

— Oui ? Qu'est-ce que tu me veux encore, Renaud ?
— Je… Laure, je viens pour m'excuser. Je…
— Tu l'as dit, alors c'est fait. Rentre chez toi. Je ne t'ouvrirai pas le portail. Et si tu le franchis, je te jure que cette fois j'appelle la police.
— S'il vous plaît, prenez au moins les roses… Je n'ai personne à qui les offrir.
— Eh bien donne-les à ton sale type de copain ; vous alliez si bien ensemble… De toute manière, j'ai averti mon mari et il vous retrouvera.
— Mais… nous… enfin, moi, je n'ai rien fait ! Vous étiez consentante. Je ne vous ai pas forcée ou obligée.
— C'est bon, laisse-moi tranquille. Tu as dit ce que tu avais à dire, alors rentre chez toi.
— Je ne partirai pas tant que nous n'aurons pas parlé, vous et moi. Je ne vous veux aucun mal. J'ai mal agi et mon ami aussi, mais il n'est plus mon ami.
— Ce sont tes affaires, pas les miennes. Ouste, du balai ! Laisse-moi !

Laure appuie sur le bouton « off » de la caméra et le jeune disparaît. Quelques secondes plus tard il réenclenche la sonnerie. Il garde le doigt appuyé sur le pressoir, et le bruit strident vrille en permanence les oreilles de la femme. De rage, elle s'empare de son sac à main, de sa veste, et saute dans sa voiture. Quand Renaud voit le portail qui s'ouvre pour laisser passer la voiture, il doit faire un écart pour qu'elle ne le renverse pas. Il court derrière le véhicule alors que celui-ci doit marquer le stop au bord de la chaussée. Au moment où sa main se tend pour s'accrocher à la portière, Laure démarre en trombe, laissant là le lascar qui jette le bouquet dans sa direction.

Maintenant, la rage est dans les deux camps. De loin, dans son rétroviseur la femme de Gabriel voit son jeune voisin qui gesticule en trépignant sur place. Mue par elle ne sait quelle idée, elle tourne d'un coup dans la petite rue qui mène chez les parents du garçon. Deux cents bons mètres séparent leur maison du coin de la ruelle, et alors qu'elle sonne chez eux, elle voit au loin Renaud arriver en courant. Alors que la mère du jeune homme vient d'ouvrir la porte, le gaillard arrive, essoufflé.

— Oui ? Tiens, bonjour Laure !
— Bonjour, Thérèse.
— Ça fait bien longtemps que l'on ne s'était pas croisées. Comment allez-vous ? Vous avez un souci ?
— Oui. Je peux entrer pour que nous en parlions ?
— Attends, maman, je vais m'occuper de notre voisine, si tu le permets.
— C'est à ta mère et à ton père que je veux parler, Renaud ! Tu vas m'empêcher de leur parler, peut-être ?
— Oh, mais c'est avec mon fils que vous avez un problème ? Qu'est-ce qu'il se passe, Renaud ? Tu veux bien m'expliquer ?
— Rien, maman, c'est une folle. Elle raconte n'importe quoi.
— Elle n'a encore rien dit ! Attends, j'appelle ton père. Maxime ! Maxime, tu peux venir un instant s'il te plaît ?
— Maman, laisse papa en dehors de tout ceci.
— Qu'est-ce que tu as à cacher ?
— Eh bien, vas-y, raconte à tes parents, mon petit ami. Dis-leur comment avec ton pote vous êtes venus me menacer en vous introduisant dans mon jardin.
— Quoi ? Tu as vraiment fait cela ? Entrez ! Entrez, Laure. Nous allons voir de quoi il s'agit. Et mon épouse va nous faire du café.
— Non merci. Je veux que vous teniez votre fils éloigné de chez moi, sinon mon mari ira déposer plainte contre lui. Violation de domicile, ça peut lui coûter cher.
— Mais… enfin, dis-moi que ce n'est pas vrai, Renaud ? Ne me mens pas ; je veux savoir ce que tu as manigancé avec ce voyou… ce Cyril du diable !
— Papa, elle… cette femme n'a rien à faire chez nous. Pourquoi serions-nous allés chez elle ? C'est elle qui nous a racolés.
— C'est cela, petite frappe ! Je peux vous dire que je vais chez les gendarmes de ce pas. Votre gaillard, là, était encore devant ma porte à me harceler. Du reste, il avait un bouquet de roses, qu'il a jeté de rage sur la route près de mon portail. On peut aller vérifier si vous voulez…
— Alors, Renaud ? Bougre de saligaud, déjà que tu ne fais rien de tes journées ! Si en plus c'est pour nous créer des histoires avec les voisins, je te flanque à la porte. Tu iras squatter chez ton bon copain puisqu'il en est ainsi.
— Laure ! Je vous en conjure, je venais pour m'excuser. C'est vrai que nous avions eu envie de rigoler, mais je ne veux plus le voir ce sale con. Je vous en prie, supplie, ne me mettez pas dehors ! Papa, maman, je vous promets que plus jamais je ne ferai de bêtises…
— Bien ! Fiche-moi le camp dans ta chambre. Nous allons écouter et parler avec Laure, et nous verrons ce qu'il convient de faire. Je ne veux plus te voir de la soirée.

Le jeune coq est ressorti de la pièce en lançant un regard noir à la brune. Celle-ci raconte l'intrusion de deux idiots et sa peur de retrouver une fois encore le jeune homme devant son portail. Fleurs ou pas fleurs, elle ne veut plus le revoir. Et les parents, trop heureux que leur progéniture s'en sorte à si bon compte, promettent de tout faire pour l'empêcher de nuire à leur voisinage. Un peu rassurée, Laure reprend sa voiture.

Comme elle n'a plus envie de rentrer chez elle, elle roule la tête dans les nuages, sans trop savoir où, ni vers quelle destination elle fonce. Le ruban gris de l'asphalte défile sous les roues, et lorsqu'elle revient à la réalité des choses, Laure s'aperçoit qu'elle est tout près de l'immeuble de Lydie. Finalement, quoi de mieux pour se vider la tête que d'aller voir si la jeune femme est chez elle ? Chose dite aussitôt faite ! Et la brune, sans se presser, gravit les deux étages de l'HLM où elle a déjà passé quelques heures. À la première sollicitation du carillon de l'entrée, des pas traînants se font entendre derrière la porte, puis le bruit de la clé qui tourne dans les entrailles de la serrure, et enfin le visage qui apparaît s'éclaire soudain d'un sourire mi-amusé, mi-étonné.

— Laure ! Eh bien, si je m'attendais à te revoir si vite… Entre, ne reste pas dans le couloir.
— Je passais par là, alors pourquoi ne pas te rendre une petite visite ?
— Tu as bien fait. Mais tu es vraiment certaine que tu passais par là ? D'ordinaire, les bourgeoises – ne te fâche pas, il n'y a rien de péjoratif là-dedans – les femmes d'un certain style ne viennent pas vraiment par hasard ici. Mais je suis contente que tu aies eu envie de… me revoir.
— J'ai un loustic qui me harcèle un peu chez moi, alors je suis allée m'expliquer avec ses parents et j'avais besoin de me calmer les nerfs.
— Je vois. Donc quoi de mieux que de venir s'encanailler avec la petite vendeuse de chez Morgan ? Ce n'est pas pour me déplaire, je dois être honnête.
— Mais…
— Allons, ne fais pas semblant de ne pas comprendre. Moi aussi j'ai trouvé bien agréable notre partie de jambes en l'air. J'aimerais que nous corsions un peu plus nos jeux… ça te dirait, à toi ?
— … je ne saisis pas tout de ton message, si c'en est un.
— Attends, tu vas comprendre tout de suite… viens donc par là.

La jeune femme en déshabillé vaporeux pousse fermement Laure vers la cuisine et avec un sourire la fait asseoir sur une chaise au fond paillé.

— Donne-moi tes mains. Oui, comme ça, dans ton dos.

Laure sent que sa complice de la veille lui serre les poignets contre les montants du dossier.

— Qu'est-ce que tu fais ? Je… Non ! S'il te plaît !
— Chut, ma belle… Je viens d'avoir d'un coup envie de cela. Et puis, apparemment, tu es venue pour jouir encore un peu ; alors autant que nous en profitions tous.
— Je ne suis pas venue pour cela. Hé, tu me fais mal ! C'est trop serré. Libère mes mains.
— Tstt… Tais-toi donc et laisse-moi faire. Je ne vais pas te faire de mal, alors profite de l'instant qui passe. Voilà ! Au tour de tes jolies chevilles. C'est bien, ramène-les un peu vers les pieds de la chaise.

En joignant le geste à la parole, la jeune femme s'est agenouillée devant Laure qui, les fesses sur la paille, ne peut guère ruer. Et de ses pattes douces, la donzelle entreprend de fixer deux cordelettes au siège pour entraver les gambettes de sa victime consentante. Puis, avec toujours un large sourire aux lèvres, la jeunette se saisit d'un foulard qui se retrouve soudain sur les yeux de la belle brune. Noué sur sa nuque, il l'empêche de voir ce qui se trame autour d'elle. Laure respire un peu plus fort depuis le début de l'opération entreprise par Lydie.

Bien sûr que la montée d'adrénaline n'est pas due seulement à une certaine peur. L'excitation qui les gagne est toute différente pour chacune d'elles. L'une se sent telle une proie, et l'autre plutôt comme toute-puissante devant cette esclave assise. Alors, lentement pour agacer, pour faire monter plus encore la tension, Lydie tourne et virevolte sans se presser près de Laure assise à sa merci.

— Je vais te caresser. Tu ne me vois plus, mais je vais passer mes mains partout sur toi. Sans même te déshabiller, juste en écartant un peu tes vêtements. Tu veux bien ?
— … Euh… oui.
— C'est bandant, hein ? De ne rien voir, de seulement deviner ce qui va se passer. D'attendre une caresse dans un endroit alors qu'elle arrive dans un autre, c'est troublant pour toi. Mais ça l'est aussi pour moi de te regarder te tortiller sur ta chaise. Voilà ! Tu as des seins magnifiques. Il ne doit pas s'ennuyer, ton mari, avec de tels airbags.
— … !
— Et si je faisais venir moi aussi un ami pour te tripoter ? Qu'en penses-tu ? Il y en a un qui me court après depuis des semaines. Un qui n'a toujours pas compris que je ne serai jamais à lui, qui ne se doute pas que je suis juste… une fille à femmes.
— Quoi ? Tu ne vas pas le faire ! Je ne…
— Chut, ma belle ! D'abord, je vais te faire taire, et ensuite j'aviserai.
— Quoi ? Qu'est-ce que tu vas faire ?
— Ça, ma douce, ça !

Et sur la bouche de Laure, c'est une pression étrange. Un objet dur qui se colle à ses lèvres. Elle cherche à détourner la tête en se tordant le cou, mais dans sa position rien n'est simple, et comme elle garde les mâchoires fermées, la jeune a une idée de génie : elle lui pince le nez. Pour respirer, Laure est bien obligée d'ouvrir le bec. L'autre en profite pour lui enfiler dans le gosier ce que la femme attachée ne parvient pas à identifier.

— Eh bien, tu vois, ce n'était pas si compliqué. Un bâillon et te voilà sage comme une image, prête à recevoir le loup.
— …
— C'est bien. Tu es belle, et j'adore ta poitrine. Je vais essayer de baisser ta culotte. Tu pourrais faire un effort ! Lève un peu tes fesses de la chaise. Oui, comme ça, c'est bien. Elle n'est pas mal, dentelle et petit flot ; elle ne vient pas de mon magasin, cette petite culotte ? Bien. Je retrousse un peu ta jupe ; tu peux une fois de plus te relever de quelques centimètres ? Juste pour que je ne la froisse pas trop, ce serait dommage. J'apprécie de toucher ta chatte, ma belle. Comme elle est lisse et… Oh ! Mais tu mouilles déjà ! Cochonne, avec ça, et ça ne veut pas le faire voir…
— …

Sur sa chaise, Laure, entravée, ne peut que subir les attouchements de la jeune femme qui ne se prive pas de tout effleurer. Le doigt qui glisse sur la longueur de sa fente est chaud, agréable, et elle ne peut y résister. Lydie se frotte contre le visage de la brune avec insistance, sachant faire monter la température progressivement. Ce qui au départ ne devait être qu'un jeu ordinaire devient très vite un échauffement des corps. Au bout d'un temps que personne ne peut comptabiliser, les mains et les pieds sont détachés. Et sur une moquette épaisse, deux corps roulent, emmêlés dans des ballets voluptueux.

Deux chevelures dansent entre des cuisses largement ouvertes, crinières ondulantes de femelles en rut. La pièce n'est plus remplie que de soupirs et de gémissements, incantations d'amour qui reflètent le haut degré de chaleur, qui font fondre les ventres et battre plus vite les cœurs. Là, pas question d'amour, mais bien de sexe à l'état pur, pratiqué par deux poupées désarticulées qui sont uniquement à la recherche du partage d'un vrai plaisir. Le réconfort que Laure trouve chez Lydie est matérialisé sous la forme de mains, de langue aussi, qui parcourent de vastes étendues lisses ou vallonnées.

La cavalcade finit par porter ses fruits, et c'est dans un hurlement à faire trembler les murs que la cadette se libère de sa tension par un orgasme inattendu. La bouche de sa camarade de jeu, plaquée à sa chatte, elle se laisse aller à fondre pour de bon, et c'est une véritable inondation qui envahit soudain la bouche de sa partenaire toujours aussi excitée. Impossible de retenir ce liquide qui éclate en un jet puissant au visage de Laure. Le ventre de son équipière du moment tressaille alors que le flot d'un fluide clair s'échappe en même temps qu'un hurlement de bête enragée.

Tous les muscles de la belle jeune femme sont sollicités dans cette preuve flagrante d'un orgasme hors norme. Les mains de Lydie se sont accrochées à la chevelure de sa compagne, lui interdisant involontairement tout repli. Celle-ci ne peut donc que subir le flot de cette eau d'une fontaine naturelle, et les traces de cette expulsion spontanée sont visibles sur la face de Laure mais également sur la laine de la moquette qui sera bonne à nettoyer. Après cet intermède puissant, la gamine se calme enfin.

— Wouah ! Tu m'as donné des frissons, ma belle.
— Tu… tu n'as pas une serviette ? J'en ai partout !
— Si, si, là, sur le coin de la table. Ça m'arrive parfois de… ne pas me retenir, de lâcher prise et d'inonder tout ce qui se trouve aux environs.
— Au moins je sais que tu ne simules pas.
— Oui. Mais d'habitude ça ne m'arrive que lorsque je me masturbe toute seule. C'est bien la première fois qu'une autre femme me fait jouir de la sorte !
— Eh bien, tout arrive à qui sait attendre, tu vois.
— Et toi ?
— Quoi, moi ?
— Ça ne t'arrive jamais ? D'être une fontaine, je veux dire.
— Si, mais c'est moins… puissant, et c'est toujours avec mon mari.
— Ah ? Il doit être bon au lit, celui-là, alors.
— Hep là ! C'est chasse gardée. Pas touche.
— Allons, tu as bien compris ? Je ne suis pas demandeuse de leur grosse machine ; je préfère les lèvres douces et les joues imberbes des filles, et ce n'est pas ton mâle qui me fera changer d'avis.
— C'est bien. Parce que lui, je ne le partage pas !

À ces mots les deux femmes éclatent d'un gloussement rauque. Si l'une d'elles pense vraiment ce qu'elle dit, la seconde n'en est plus aussi certaine. Enfin Lydie éponge presque avec amour sa conquête d'un soir et Laure, docile, se laisse faire. Les mains se serrent les unes dans les autres et un nouveau baiser plein de fougue ressoude leurs bouches gourmandes. Et c'est blotties dans les bras l'une de l'autre que le sommeil vient les emporter vers un demain pas très lointain. Deux corps nus qui pendant quelques heures restent sages après avoir vécu de délicieux tourments.

Si Gabriel est dans les deux têtes, c'est pour des raisons diamétralement opposées. Laure ressasse sa lâcheté envers son mari alors que Lydie le maudit presque, cet inconnu, de posséder celle qui la fait le plus vibrer.