La recherche de l'autre perdue

Mars est revenu ; l'hiver passé à trois tire à sa fin. Le lac reprend ses couleurs printanières et les évènements ont évolué entre Jeanne et Gabriel : leur divorce est scellé. Leur demeure appartient maintenant à une autre famille. La brune va signer dans quelques jours pour l'achat d'un appartement en ville. Entre nous trois, tout est toujours parfait. Stéphane ne parle pas de ce départ qui le peine ; quant à moi, je ne sais pas vraiment comment je vais pouvoir assumer cette séparation. C'est en réalité un véritable déchirement, un crève-cœur.

Jeanne jure les grands dieux qu'elle reviendra nous voir, qu'elle aime faire l'amour avec toi, avec moi, avec nous, quoi ; mais ce mélange qui va disparaître marque au fer rouge notre couple. Nous avons durant tous ces mois – ces saisons même – vécu une formidable expérience. J'ai peur de ces lendemains qui vont redevenir monotones. Ce triangle amoureux offrait bien des avantages, et je ne sais pas bien comment gérer un après-Jeanne imprévisible. Je n'ose pas y songer tant ça me fait déjà mal.

Je me plonge de plus en plus dans les amours de Paule, Damien et Dimitri, et j'en fais des tonnes. Leur histoire aussi risque de tourner court si, comme j'en ai peur, le spleen me rattrape. Tu ne me dis rien, te contentant de me serrer plus fortement la main lorsque je tente d'aborder le sujet. Comme elle nous rejoint toutes les nuits dans notre chambre, nous n'avons donc pas souvent l'occasion d'en discuter tous les deux. La journée, elle et moi aménageons son nouveau nid. Un immense trois-pièces dans le centre du bourg.

Entre papier peint, rideaux et autres meubles à installer, nous passons le plus clair de notre temps ensemble. Jeanne rit, m'entraînant dans ces incroyables jours qui passent trop rapidement. Le soir, tant que les travaux ne sont pas terminés, elle les passe à la maison ; quant à ses nuits, c'est toujours un partage entre toi et moi. Personne ne s'en plaint et chacun prend un plaisir dont nous connaissons tous la fin imminente. Elle est radieuse, et elle se donne sans compter. Mais nous deux, nous savons bien que ce bonheur ne va plus durer très longtemps encore.

Je te surprends certains matins devant la porte-fenêtre qui donne sur la terrasse avec comme un voile dans tes regards. Elle va te manquer. Tu ne l'avoueras jamais, mais j'en suis sûre. Et je sens, je sais qu'il en est de même pour moi. Cette femme avec sa gentillesse, c'est un peu de notre amour qu'elle va emporter ailleurs par son déménagement proche. Je me demande si nous saurons vivre à nouveau sans elle. Je m'en veux de ne pas avoir le courage de lui demander de rester avec nous ; mais elle a peut-être besoin de respirer, de connaître de nouvelles passions.

C'est au dîner de ce soir qu'elle nous annonce tout à trac qu'elle s'envolera lundi matin.

— Élyse, Stéphane, je vous remercie pour ces mois où vous m'avez supportée. Je vais vous quitter lundi.
— Ça y est, alors ? Tu as décidé de nous abandonner ?
— Non, Stéphane : juste de vous laisser souffler à nouveau librement. J'ai mis assez de chambard dans votre couple.
— Mais… moi, ma belle j'ai trouvé cela… merveilleux, cette sorte de vie commune.
— Tu es gentille, Élyse, mais crois-tu que je n'ai jamais remarqué tes moments de jalousie ? Je sais combien tu as craint que je te vole ton amour. Et puis… rien n'est fini ! Nous nous reverrons, de toute façon. Nous recommencerons des soirées tous les trois… ce sera simplement chez moi de temps en temps, ou ici…
— Oui ! Oui, Élyse et moi sommes très heureux d'avoir parcouru un bout de chemin avec toi.
— Je suis aussi ravie de ce qui nous unit depuis mon arrivée chez vous. Je ne crois pas que j'aurais tenu le coup, toute seule. J'adore faire l'amour avec vous deux, ensemble ou séparément ! Oui, Élyse, Stéphane et moi savons combien tu nous épiais, et nous en avons joué, abusé peut-être parfois.
— C'est très excitant de regarder un homme et une femme faire l'amour ; je ne le savais pas avant toi, ne l'avais jamais non plus soupçonné.
— Oui ? Mais tu en as parfois souffert aussi…
— J'ai toujours eu confiance en Stéphane. Un peu moins en toi, au début, je l'admets ; mais au fil des jours, cette jalousie s'est transformée en espérance et en attente. Un bonheur que je vais perdre lundi.
— Mais non ! Je passerai te voir, voir Stéphane également. Ou tu viendras, vous viendrez, seuls ou à deux.
— Non, parce que, vois-tu, pour moi, ce que nous faisions là était un jeu librement consenti. Me dire que je vais aller chez toi pour faire l'amour avec toi, c'est dans mon esprit tromper mon mari.
— Mais si moi je suis d'accord ? Ce ne sera pas me tromper, Élyse, puisque je suis d'accord.
— C'est plus complexe que ça, Stéphane. La notion de tromperie, tant que c'était chez nous, de l'intérieur, ce n'était pas faire mal. Mais aller chez Jeanne juste pour une relation charnelle implique dans ma tête les notions de mal et de duplicité. Ici dans notre maison, tu pouvais tout voir, tout savoir. Chez elle, c'est différent. Non, je n'irai jamais seule chez toi, ma belle ; du moins pour faire l'amour.
— Je comprends… Je viendrai ici, alors.
— Si tu veux… mais je suis certaine – et Stéphane ne va pas me contredire – que tu ne seras pas toujours célibataire… ou solitaire.
— Eh bien, je vous amènerai un beau ténébreux pour des plans à quatre… Vous ne seriez pas tentés ?
—… ? Je ne me suis pas encore posé la question… C'est surtout toi, Stéphane, qui pourrais être jaloux pour le coup.
— Pourquoi ? J'ai bien pris Jeanne devant toi. Alors te voir dans les bras d'un autre à ton tour pourrait me faire bander également…

Nous avons stoppé là notre dialogue, affolés par son départ et ces paroles qui nous excitent. Alors que nous reste-t-il à faire ? Eh oui… nous renouvelons une fois de plus ces gestes, ces mouvements qui libèrent notre plaisir. C'est comme un adieu, un bouquet final. Je me donne corps et âme à cette partie de plaisir où tout est en commun : nos pensées, nos ventres et nos caresses, pour finir par nos sexes qui se justifient en explosant dans des jouissances réciproques et magnifiques.

Jeanne se retrouve comme presque toutes les nuits à s'endormir entre nos deux corps. Pourtant, cette fois ce n'est pas ma menotte que tu serres pour t'endormir. Je l'ai comprise, ta douleur de la savoir sur le départ. Elle ressemble tant à celle qui me déchire les tripes et le cœur… des souffrances jumelles, en quelque sorte.

Et le lundi matin arrive trop vite, avec le crève-cœur de la voir, souriante, charger sa voiture. Je reste un peu en retrait, dans l'ombre. Toi, tu es parti à ton bureau sans ce sourire qui me charme tellement. Le bisou de départ entre nous deux n'avait pas une saveur exceptionnelle, mais celui échangé entre Jeanne et moi m'a tiré des larmes…

Le printemps n'a pas toutes les années la même saveur, et celui qui renaît là tue aussi une belle histoire.


Sous mes doigts, sur la page Word, Paule et Dimitri finissent de s'aimer. La jeune femme adore son partenaire de jeu et voudrait l'embrasser encore et encore. Dans la cuisine, plus précisément sur la table où ils viennent de se détacher l'un de l'autre après un nouvel accouplement sauvage, la jeune femme remarque cette tache de sperme qui nappe le bois.

— Cochon ! Il faut vite nettoyer. Mon Dieu, comment peux-tu encore après cette nuit avoir autant de réserves ?

Elle l'essuie avec un papier absorbant avant de le jeter dans la poubelle, puis d'un coup elle semble se souvenir :

— Ta mère ! Bon sang, elle va être en colère ! Et puis ton coloc ? Il ne devrait pas être rentré ? S'il nous avait trouvés dans cette position, tu imagines sa tête ? Le pauvre ! Il aurait pensé quoi de moi ? Allez, je prends une douche et je file. Tu m'appelles s'il rentre, que je ne sorte pas à poil de la douche. Ma mère va me poser encore mille questions. Bon, je parle, je suis bavarde… Hé, je t'aime, tu le sais ?

Le bisou qu'elle lui colle sur le bout du nez est comme une promesse d'un amour éternel. Les débuts encourageants d'autres offrandes aussi charnelles. Pourtant celui qu'elle persiste à appeler Damien est dans ses petits souliers. Comment son frère va-t-il prendre la chose ? Et Paule, elle, lorsqu'elle saura, comprendra ? Elle va le tuer pour ce qu'il a fait… Quelle connerie ! Piquer la copine de son frangin par ruse… C'est inexcusable. Il ne trouve pas de solution dans sa caboche ; il se fait l'effet d'un beau salopard !

Il s'étonne même que cette nana n'ait pas deviné, qu'elle l'ait pris aussi simplement pour son frère. N'y a-t-il donc rien qui diffère entre eux deux, à ce point qu'elle se soit laissé abuser, berner de la sorte ? Comment réagirait-il, lui, si Damien lui jouait un tour aussi pendable ? Mais il a beau tourner et retourner dans sa tête toutes les questions du monde, il n'a aucun argument convaincant pour excuser ce qui ne peut l'être. Habituellement, la mauvaise conscience n'est pourtant pas son fort. De guerre lasse, il retourne se coucher. Après tout, il a aimé la prendre, elle a joui, alors advienne que pourra !

La porte s'ouvre sans bruit ; avec sur ses talons un de ses gamins, Adèle entre. Dans dix ans, vingt ans, plus peut-être, les deux garçons resteront éternellement « ses gamins ».

— Tu veux boire un café, maman ?
— Si tu veux. Et Dimitri, ne me dis pas qu'il encore couché ! Il doit en faire de belles quand vous êtes tous les deux…
— Non, ça va, il est sage. Ne te mets pas martel en tête.
— Ouais… C'est moi qui l'ai fait, alors inutile de me mentir, de me raconter des histoires : je sais bien qu'il est tout l'opposé de toi, mon Damien.

Le jeune homme a discrètement donné un coup d'œil dans sa chambre : Paule est partie. Ouf ! Ça rassure de savoir qu'elle ne s'est pas rendormie et qu'elle ne va pas se coller dans les pattes de la maman.

Il respire un peu mieux alors qu'il revient vers cette mère poule qui s'est déjà collée au repas de ses rejetons. Provenant de la sauteuse, un fumet attractif embaume l'appartement. Alors, tranquillement, Damien pose assiettes et couverts sur la table. C'est le moment que choisit son frangin pour débarquer dans la cuisine.

— Ah ! Vous êtes rentrés ? Maman… ça va ? Ça sent drôlement bon ce que tu nous mijotes.
— Ne viens pas comme d'habitude coller tes grosses pattes dans mes gamelles ! Fais comme Damien, attends le repas. Regarde-moi cette tête que tu trimballes… Tu n'es pas raisonnable.
— Pff ! Il n'y a que Damien qui fait bien, quoi ! Le chouchou de sa maman chérie, comme d'habitude…
— Tu n'as pas le droit de dire cela : je n'ai jamais fait de différences entre vous.
— Tu sais que ton fils préféré a une copine ? Elle couche ici depuis…
— Ben, mon fils, je ne t'ai pas appris à cafter de la sorte. Tu es jaloux ? C'est de votre âge, non ? Et toi, Damien, c'est une fille sérieuse au moins ? Tu ne t'amuses pas avec elle, n'est-ce pas ?
— Oh si, que le chérubin joue avec sa belle poupée… Et pour jouer, je peux te dire qu'il sait y faire.
— Qu'est-ce que tu racontes, Dimitri ? Ça te prend souvent de me dézinguer comme ça ? Tu deviens cinglé, ma parole !
— J'oubliais, maman… Oui, c'est si sérieux que monsieur veut partir, me planter là dans cette turne.
— C'est vrai ça, Damien ?
— Enfin, maman, nous sommes majeurs il me semble. Et vivre avec un frère comme Dimitri n'a rien de réjouissant.
— C'est vrai, je n'ai pas tous les attributs de cette Paule… Tu vois, maman ? Pas se seins ni de jolies fesses.
— Tu vas finir, oui ou non, Dimitri ? Sinon je rentre de suite à la maison !
— D'accord… Pardon, maman, mais je suis mal réveillé.
— Ce n'est pas une raison pour dénigrer ton frère ni pour te comporter de cette manière. Tu auras toi aussi un jour une petite amie. Et gageons que Damien sera plus diplomate que toi, mon chéri. Je n'aime pas vous entendre vous chamailler pour des peccadilles.
— Peccadilles, peccadilles… Si tu l'avais vue cette nana, maman…
— Oh, mais je la verrai peut-être un jour, non ? Qu'en penses-tu, Damien ?
— …

La présence d'Adèle évite à Dimitri d'avoir à affronter son frère sur le terrain miné de Paule. Il sait bien qu'il a fait l'erreur de sa vie, que rien ne va sans doute se passer comme il le voudrait, et mes doigts qui tapent l'histoire semblent s'énerver alors que Stéphane rentre du travail. Comme d'habitude, il s'engouffre dans la salle de bain.

Quand il revient, je suis figée devant la page qui n'avance plus.

— Ça va, mon ange ? Tu as repris ton roman ?
— Oui. Mais bon, je vais m'arrêter là pour ce soir… mes personnages sont en pleine crise familiale.
— Je peux lire quelques lignes ?
— Non ! Non, Stéphane, tu sais bien que je n'aime pas cela.

Le baiser qu'il dépose sur ma joue n'a rien de spécial. Il n'a plus non plus l'attrait de ceux des mois passés. Et il se raidit en sentant bien que je n'ai guère d'entrain pour le suivre sur le terrain ou il voudrait m'entraîner.

— Le départ de Jeanne, c'est cela, n'est-ce pas ?
— Je ne sais plus trop comment vivre après ces mois si…
— Tu crois que nous n'aurions jamais dû nous vautrer dans la facilité d'une relation à trois ? Notre amour résistera-t-il à cette affaire ? Elle me manque, mais à toi aussi, n'est-ce pas ?
— Je dois bien avouer que oui. Je t'aime aussi, mais c'est si différent, comme s'il me manquait quelque chose…
— Je pense exactement de la même manière. Nous sommes désorientés : j'ai envie de toi, j'ai envie d'elle, et c'est vrai que mes sentiments balancent entre elle et toi ; mais son départ, c'est son choix.

La main de Stéphane est sur mon poignet. Elle reste de sa douceur coutumière, mais c'est bien ma perception qui s'en trouve changée. Je referme d'un geste machinal le dossier Paule Damier et les autres. Le noir tombe sur l'écran qui s'éteint. Je ne veux pas non plus te perdre alors que nous venons de la perdre, elle. J'approche ma bouche de tes lèvres, mais le baiser que nous échangeons n'a pas la saveur des envies passées.

Si mon cœur bat dans ma poitrine, c'est plus de dépit que de désir. Je ferme les yeux et tu m'embrasses, mais l'élan n'est pas communicatif. Tu le sens si bien que tu n'insistes pas, et dans le silence de notre nid tu laisses tomber quelques paroles qui perturbent mes pensées. Mais avec quelle justesse elles sont dites !

— Je crois que les dégâts sont plus grands que nous le pensions… Je ne sais plus, ne sais pas si toi et moi allons survivre à cette épreuve…
— Qu'est-ce que tu veux dire, Stéphane ?
— Que c'est le début de la fin, non ? À trop jouer avec le feu, nous nous sommes brûlé les ailes. Reste à savoir ce que tu veux : continuer une vie commune compliquée, ou prendre un peu de recul.
— Tu… tu veux me quitter, toi aussi ?
— Ce « toi aussi » montre la profondeur du malaise, Élyse ; tu t'en rends bien compte.

Je sais que tu as raison. Mais bon sang, que faire ? Dans tes yeux, il y a du désespoir. Et la façon dont tu me regardes laisse supposer qu'un pareil reflet se trouve dans mes mirettes. Je sens en moi comme un vide immense. Ce qui nous tenait debout avait pour prénom Jeanne. Quelques larmes montent malgré moi aux coins de mes yeux. Je voudrais retenir le temps, le stopper dans sa course folle. Ramener notre univers à une date antérieure, un « avant elle » qui ne peut ressurgir du passé, je le sais bien.
Je balbutie, idiote, maladroite, comme une prière :

— Je… je t'aime pourtant, Stéphane… je t'aime vraiment.
— Le pire, ma belle, c'est que moi également je crève de toi. Mais elle laisse un trou énorme dans notre existence. Et si…
— Oui ? Si ? Dis toujours, si tu as une idée…
— Si nous allions ensemble la chercher ?
— Mais… elle ne voudra jamais revenir ; elle était si heureuse de retrouver sa liberté !
— Ce n'était peut-être qu'une façade. Après tout, nous n'avons pas essayé de la garder… Viens ! Allons la trouver.
— Tu… tu es sérieux, là ?
— Bien entendu que je suis sérieux. Si je veux te retrouver, il faut qu'elle aussi nous rejoigne, sinon… c'en est fini de notre si beau duo, mon amour.
— Stéphane… je t'aime…
— Alors, viens ! Allons chez elle.
— Oui ! Oui, je viens. Mais tu me donnes juste une minute ; juste une, s'il te plaît…
— Pour quoi faire ?
— Chut… attends ! Ça ne sera pas long.

Je viens de presser sur le bouton de mon ordinateur. Il se rallume et je rouvre le dossier où Damien, Adèle et Dimitri sont sagement en attente. Je remonte de quelques paragraphes, et d'un trait de souris je bleuis l'ensemble. Je reviens sur la trahison du frère de Damien. D'un simple geste, j'enfonce la touche « effacer », et il ne reste plus rien d'autre que l'amour entre Paule et Damien. Je ne veux pas que ceux-là souffrent comme c'est mon cas en ce moment.

Demain, pour eux, j'écrirai une « happy end » plus à la mesure de ces amours qui commencent. Alors c'est bien d'un pas mal assuré que je te suis pour nous rendre ensemble chez Jeanne. Comment va-t-elle appréhender notre demande, notre prière ? Ni toi ni moi ne le savons, mais notre amour est au prix de cette démarche. Alors je prie muettement pour qu'elle veuille bien revenir chez nous partager pour toujours notre vie.


Assise au milieu de la librairie, je vois défiler un tas de personnes, femmes ou hommes. Elles arrivent toutes avec dans les mains L'histoire d'une histoire, mon dernier roman. Une affaire de famille avec quelques personnages centraux qui se sont déchirés pour l'amour d'une belle jeune femme, Paule, qui est tombée amoureuse de deux frères jumeaux. Au milieu de la matinée, un couple s'arrête près de moi. Les visages sont souriants, et je sais que ces risettes qui m'atteignent me sont entièrement destinées.

— Alors, Élyse, comment ça se passe ici ?
— Oh, je n'ai pas arrêté de dédicacer des livres. Les gens sont ravis, et j'avoue que ça me rend fière de mon travail.
— Tu as bien raison, ma belle ; mais il est l'heure de rentrer à la maison : le déjeuner est prêt. Tu nous raconteras, les pieds sous la table.
— Oui, oui, avec grand plaisir !

Alors, sous les regards plutôt ébahis des derniers clients de la librairie, nous partons tous les trois en nous serrant les uns contre les autres. Il y a tant d'amour dans nos têtes que nous sommes tous heureux.

Qui a dit qu'un ménage devait nécessairement n'être composé que de deux personnes ?