La bataille finale (2/2)

— Hé, toi, touche pas à mon homme. MALLEUS MALEFICARUM !

Cette voix, c'est ce qui m'empêche de sombrer complètement. Je sens un cosmos puissant et familier s'abattre dans le dos de mon bourreau. L'étreinte sur mon cou se desserre. Je tombe à terre.

— Ouais, touche pas à mon pote. REDEMPTION SONG !

La vision encore troublée, je vois à peine le corps d'Arès être secoué de tous les côtés, mais mon sixième sens perçoit parfaitement le cosmos de Sanka se déchaîner. Arès s'écrase au sol mais se relève sans trop de dommages.

— Ça, c'était aussi de la part de Lioubov, sourit Sanka.
— Quoi ? Vous êtes encore opérationnels vous deux ? s'étonne le dieu de la guerre. Je croyais vous avoir réglé votre compte avec mon Brotoloig?s tout à l'heure.
— Ouais, j'avoue que ça m'a bien piqué la gueule, mais je ne compte pas mourir sans m'être assuré de t'emmener avec moi dans la tombe.
— Pff, bande de minables… Vous pensez que vous allez pouvoir me tuer avec aussi peu de puissance ? Combien de fois va-t-il falloir que je vous écrase pour que vous compreniez la leçon ?

Arès s'avance vers la Vierge et le Cancer, mais l'énergie dégagée par ma belle lui réserve une terrible surprise : elle lève les bras pour lancer son Armageddon. Une pluie de météorites s'abat sur Arès. Ça explose de partout. Le palais d'Aphrodite ne résiste pas à tant de puissance ; il s'écroule de tous côtés. Les chevaliers présents sont été projetés par la puissance de l'attaque.

— Argh ! Que s'est-il passé, bon sang ? gémit la voix criarde du Maquereau.
— C'est l'attaque de la Vierge, souffle Irma du Verseau.
— Elle est dingue ! Elle aurait pu tous nous tuer, cette conne ! Bon, avec un peu de chance elle aura tué les chevaliers noirs.

J'entends mes collègues se relever. Au soupir que pousse le Maquereau, je comprends que ses espoirs sont réduits à néant. Je l'entends courir vers l'endroit d'où provenait la voix d'Irma.

— Vite, relève-toi, ils sont encore vivants. Va les tuer !
— Minute, laisse-moi respirer…
— Mais non, magne un peu ton cul ! Ils ont pas l'air d'être contents. Protège-moi.

C'est là que je rouvre les yeux. J'ai le corps tout endolori. Mon armure a encaissé la plus gros du contrecoup de l'attaque de Marie. La voilà bien abîmée, mais pas suffisamment pour ne plus être utile. Je me relève et observe les décombres fumants tout autour de moi.

Horreur ! Arès est toujours debout. Pas de dégâts apparents, juste quelques fêlures sur son armure. Même la plus puissante attaque de la Vierge n'a pas été suffisante pour lui régler son compte ! Peut-on vraiment le vaincre ?

— VAGUE DÉFERLANTE ! hurle Amalia.

Ne voulant pas lui laisser une seconde de répit, le Lion repart à l'assaut. Une vague d'eau s'abat sur Arès, qui subit l'attaque sans broncher : impossible de l'achever avec une si faible attaque. Cependant, je comprends qu'Amalia cherchait à gagner du temps pour laisser le Capricorne lancer son attaque.

— Par la porte des dieux !

Un carré doré s'ouvre dans le ciel et tente d'aspirer Arès, mais il résiste. Ses pieds restent bien ancrés au sol. Le dieu est trop puissant pour se laisser avoir par une telle attaque. Il envoie une vague d'énergie sur Judith pour dissiper sa technique. Pas grave, on va finir par l'avoir à l'usure.

— EXPLOSION CATACLYSMIQUE !

Mon orbe de cosmos en avant, je le charge avant qu'il n'ait eu le temps de réagir. Je le touche en pleine poitrine. Son corps est projeté au loin. Une violente explosion retentit. Je ne me fais pas d'illusions, il n'est pas mort. Marie est sur la même longueur d'onde que moi ; elle le frappe avec son Malleus Maleficarum avant que nous ayons pu voir le résultat de mon attaque.

— Allez, qu'est-ce que tu fous, Irma ? Magne-toi le cul et tue-moi ces deux pétasses !

Visiblement, Emmanuello est toujours aussi inutile dans le combat contre les chevaliers noirs. Il se contente de se planquer derrière notre collègue. Pauvre Verseau ! Devoir affronter seule deux ennemis… l'ayant déjà vécu, je la plains.

— Bon, tu commences vraiment à m'agacer, sale Maquereau de merde ! s'emporte Irma. T'es qu'un incapable tout juste apte à aboyer des ordres aux autres. Franchement, j'en ai marre de me faire traiter comme une chienne.

Elle chope le Maquereau par la peau des fesses et le balance devant elle. Emmanuello se ramasse comme une grosse merde.

— Il est temps pour toi de devenir un homme et de mériter vraiment ton titre de chevalier d'or.
— Ah, panique-t-il, et si je meurs ?
— Eh ben j'en ai plus rien à secouer. Démerde-toi !
— Ayéfèmi, tente-t-il, protège-moi, et mon père saura te récompenser.
— Euh… hésite Fèmi, vous avez tenté de parlementer avec l'ennemi ?

Ha-ha, s'il compte sur l'aide de la pacifique Fèmi pour combattre, il peut toujours rêver. Les deux chevaliers noirs s'avancent vers lui, le sourire aux lèvres. Le Maquereau se met en position de combat et enflamme son cosmos ; rien de bien impressionnant, tout juste le niveau d'un chevalier d'argent.

— Prenez garde, bande de chiens galeux ! Je suis Emmanuello des Poissons, fils du grand Pope. Rendez-vous et je vous accorderai la vie sauve.
— Ha-ha-ha… ricane le chevalier des Poissons Noirs. Je suis terrorisée. Sophia, doit-on se rendre, d'après toi ?
— Ouais, j'hésite, Sirena, répond la Balance Noire. J'opterais plutôt pour écraser ce minable.
— Minable ? s'étonne Emmanuello. Comment osez-vous me traiter de minable, moi le grand et magnifique Emmanuello ? Préparez-vous à subir ma plus puissante attaque. TREMPETTE !

Son cosmos resplendit, mais encore une fois rien d'impressionnant. Emmanuello gigote dans tous les sens. Son cosmos prend la consistance de l'eau. Quelques gouttelettes atteignent les ennemis, mais rien de plus. Ouais, ben c'est inefficace. Attaque de merde. Pourquoi ne suis-je pas étonné ?

Les deux femmes chevaliers noirs explosent de rire. Moi-même, si je n'étais pas occupé par mon combat contre Arès, je partagerais leur hilarité. Emmanuello rage. Il ne supporte pas l'humiliation.

— Laisse-nous te montrer ce qu'un vrai chevalier vaut, sale petit con ! déclare Sirena des Poissons Noirs. TYPHON DÉMONIAQUE !

Le corps du Maquereau est secoué dans tous les sens par une vague de cosmos tourbillonnante. Il hurle de douleur avant de s'écraser au sol.

— Et ça se dit chevalier d'or ? se moque Sophia de la Balance Noire. Tout juste bon à ramper au sol comme le vil serpent qu'il est. CHÂTIMENT CÉLESTE !

Des éclairs d'énergie cosmique de couleur mauve électrisent Emmanuello qui remue et gémit de douleur une nouvelle fois.

— Tu as de la chance minable, poursuit Sophia. Nous nous sommes montrées miséricordieuses et t'avons accordé notre pitié. Maintenant, si tu veux que nous t'accordions la vie sauve, viens nous lécher les bottes !

Malgré tout ce qu'il vient de se prendre dans la gueule, le Maquereau a le courage de se relever. Son cosmos danse à un niveau plus élevé que précédemment. Se réveillerait-il ?

— Je suis Emmanuello des Poissons, l'être le plus noble du Sanctuaire, le fils de sa majesté le Grand Pope ! Comment osez-vous me traiter comme un gueux ? Je vais vous faire payer votre impertinence. GROUAHAHAH !

Son cosmos explose et atteint enfin le niveau d'un chevalier d'or. Surprises, ses adversaires se tiennent sur leur garde. D'ailleurs, elles ne sont pas les seules à être étonnées : je partage leur sentiment. Même Emmanuello semble aussi abasourdi que nous.

— Qu'est-ce qu'il m'arrive, bon sang ? Je me sens imbattable !
— C'est ce qu'on appelle le septième sens, imbécile, lui indique Irma. Tu le serais si tu t'étais plus sérieusement entraîné.
— Ouah, c'est dingue ! Ha-ha, vous allez payer, sales chiennes. MAQUEREAU ONDES !

Son cosmos ondule tout autour de lui. Un bruit sourd résonne. Le genre de bruit qui se ressent plus par le ventre qu'il ne s'entend. Les chevaliers noirs poussent un cri de douleur. Elles se tiennent la tête et l'estomac. La Balance Noire semble même manquer d'équilibre.

— Attendez, je sens que je peux encore mieux faire. MAQUEREAU RAGE !

Les ondes cosmiques du chevalier des Poissons gagnent en puissance destructrice. Les armures des chevaliers se lézardent. Elles hurlent et tombent au sol. Le cosmos du Maquereau se calme soudain. Emmanuello est essoufflé.

— J'ai réussi ! s'étonne-t-il. Je les ai vaincues, ces pouffiasses. Ha-ha, je suis vraiment trop fort !
— Détrompe-toi, chevalier des Poissons, nous sommes encore loin d'être battues.

Sirena se relève. Sophia la suit juste derrière. Elles sont amochées mais encore aptes à se battre. Emmanuello blêmit. Il tente de retourner en mode septième sens mais son cosmos ne fait plus de miracles.

— Ah, panique-t-il, pourquoi ça ne marche plus ?
— Imbécile ! le foudroie Irma du regard. Croyais-tu vraiment pouvoir maintenir ton septième sens aussi longtemps pour ta première utilisation ?
— TYPHON DÉMONIAQUE ! hurle Sirena.

Ce coup-ci, elle met plus de force dans son attaque que la fois précédente. Malmené, le corps du Maquereau s'écrase au sol, inconscient.

De notre côté, nous résistons tant bien que mal à Arès. J'ai bien tenté de préparer de nouveau mon Gae Bolga, mais le dieu a réagi directement. Nous avons tous subi beaucoup de dégâts mais nous tenons le coup. Notre mission est trop importante pour baisser les bras. Notre volonté est de fer, et notre cosmos suit derrière, brûlant de plus en plus fort.

— Tu tiens le coup, Judith ?
— Ouais, pour le moment, mais j'avoue que je ne serais pas contre pouvoir me régénérer.

Elle a le visage en sang après avoir subi le Miaiph?nos d'Arès et j'ai cru percevoir un affaiblissement de ses pouvoirs, mais très vite elle me prouve le contraire en envoyant une pluie de débris sur le crâne de notre ennemi.

Arès aussi est du genre solide. Nous lui avons balancé un tas d'attaques, mais c'est presque comme si nous ne lui avions rien fait. Nous essayons de l'encercler, d'attaquer de toutes parts, de ne pas lui laisser une seconde de répit, mais rien n'y fait. Son armure se lézarde de plus en plus, mais pour lui, c'est toujours la grande forme.

— Brotoloig?s !

L'onde de choc de son attaque nous renverse tous une nouvelle fois. La puissance de mon cosmos et la résistance de mon armure me protègent du plus gros de son attaque, mais ça pique tout de même beaucoup.

— Bon, il est temps d'en finir avec toi, chevalier du Verseau, lance de loin Sophia de la Balance Noire.
— Vous savez, je suis capable de lire l'avenir ; et tout ce que je vois, c'est votre mort prochaine.
— Je vois que l'arrogance est un défaut commun chez les chevaliers d'or, poursuit Sirena. Je reconnais que tu es plus puissante que ton camarade, mais ne crois pas réussir à nous vaincre tous les deux.
— C'est ce que nous allons voir. Voyez-vous, mon « camarade », comme vous le dites, aussi faible soit-il, m'a offert le temps de concentrer mon aura. Je suis maintenant prête à passer au stade de conscience supérieure. OUVERTURE DU TROISIÈME ŒIL !

Oui, son cosmos a gagné en intensité mais rien d'autre ne se passe. Que prépare-t-elle ? En tout cas, les deux autres prennent la menace au sérieux et la chargent. Des coups sont échangés. Irma, seule contre deux, domine totalement les échanges. Elle s'en sort bien mieux qu'au début du combat. Est-ce parce qu'elle a gagné en vitesse ? Non, je ne crois pas ; on dirait qu'elle lit parfaitement la stratégie ennemie.

— Comment est-ce possible ? s'emporte Sirena. Nous avons beau feinter, tenter de te surprendre et de te tendre des pièges, rien n'y fait. C'est impossible !
— Je vous l'ai pourtant dit : je vois l'avenir. Comment voulez-vous me surprendre alors que j'ai un coup d'avance sur vous ?
— Ne te moque pas de nous ; c'est impossible. PAR LA LAME… commence Sophia.
— Projection astrale ! lance Irma.
— … ARDENTE !

Le cosmos de la Balance Noire flamboie d'une puissance rare. Elle s'est emparée d'une des épées de son armure qui vient de s'embraser et qui dégage une aura menaçante. Nul doute que si elle touche au corps-à-corps avec ça, elle fera énormément de dégâts. Sauf qu'elle ne sait pas quelle cible attaquer. Il y a plus qu'une Irma : ce sont maintenant douze chevaliers du Verseau qui entourent les deux chevaliers noirs. Irma peut donc créer bien plus de projections astrales que moi. Impressionnant !

Sophia charge l'une des Irma tandis que Sirena lance son Typhon Démoniaque sur une autre. Mauvaise pioche pour elles. Les Irma sourient. Visiblement, elles savaient déjà lesquelles d'entre elles allaient être visées. Les chevaliers noirs testent les Verseaux les unes derrière les autres mais ne parviennent pas à déterminer quel corps est tangible.

— Abandonnez, lancent les Irma en chœur. Nous entrons dans l'ère du Verseau, l'ère du renouveau pour l'humanité. Nous entrons dans un âge de paix, d'amour, de solidarité et de renouveau spirituel. Il n'y a pas de place pour des suppôts d'Arès.
— TA GUEULE ! s'emporte Sirena. ANNIHILATION INFERNALE !

Son cosmos a explosé et ses pouvoirs se déchaînent. Son attaque semble être la version ultime de son Typhon Démoniaque. Au lieu de ne viser qu'une seule cible, elle s'en prend à toutes les Irma, ou plutôt à tout ce qu'il y a autour. Sa collègue doit même invoquer un bouclier cosmique pour ne pas se prendre les effets de l'attaque.

La poussière redescend et les fumées se dissipent. Les douze Verseaux sont encore là, encerclant encore leurs ennemies.

— Quoi ? Mais c'est impossible ! panique Sirena. Je les ai toutes touchées d'un coup…
— PAR L'ÈRE DU VERSEAU !

Les Irma tendent les bras vers leurs cibles et libèrent une puissance monstrueuse qui implose sur les chevaliers noirs. Les armures ennemies sont brisées. Sophia et Sirena n'ont pas le temps de hurler de douleur avant de s'écraser sans vie sur le sol.

Les douze Verseaux disparaissent, comme dissipées. Quoi ? Alors il s'agissait de projections astrales ? Mais où était donc passé le véritable corps ? Ma réponse n'est pas longue à arriver : Irma apparaît planant dans le ciel en position du lotus. Elle était dissimulée dans une sorte de sphère qui la rendait invisible. Elle redescend doucement au sol.

— Fermeture du troisième œil.
— ATTENTION ! hurle la voix de Fèmi.

Mais trop tard ! Hidden vient d'apparaître juste derrière elle et la plante dans le dos à l'aide d'une des épées empruntées à la Balance Noire. Irma hurle de douleur avant de s'écraser au sol. Elle n'est pas morte sur le coup.

— Argh ! Je ne l'ai pas vu venir…
— Normal, sourit Hidden. Je suis le maître de la dissimulation. Je suis capable de me cacher, même aux yeux du futur.

Il s'apprête à l'achever mais le chevalier des Gémeaux intervient et le repousse d'une charge de cosmos. Hidden recule de plusieurs pas, se méfiant de la puissance de Fèmi.

— Comment ça va ? s'inquiète Fèmi.
— J'ai connu mieux… mais je vois encore mon avenir, alors je devrais m'en sortir. Par contre, je ne peux pas assurer pour la suite. Fèmi, par pitié, tue Hidden et libère Athéna.
— Je… je refuse de me battre.
— Il le faut ! Libère Athéna ou elle mourra.

Mes côtes me font souffrir. Mon dos aussi… et mon crâne. Enfin bref, j'ai mal partout. Bon, je suis toujours en vie, c'est ça l'important. Moi qui rêvais d'une bonne guerre, j'ai maintenant hâte d'en avoir fini, de me coucher dans mon pieu et dormir au moins une semaine. Quoi qu'il en soit, l'heure n'est pas encore venue de se reposer.

Arès est toujours présent, et la menace qu'il fait planer sur la Grèce et le monde est toujours d'actualité. Ma mission n'est pas encore finie. Athéna compte sur nous pour vaincre son ennemi et la sauver. Je me relève après la dernière attaque du dieu de la guerre. Je passe une main dans les cheveux pour dégager une mèche qui se trouvait devant les yeux, essuie le sang au bord de mes lèvres et souris.

Je ne suis pas le seul à m'être relevé : nous sommes encore tous les cinq fièrement décidés à en découdre. Même blessés, même avec des armures bien amochées, nous nous levons encore contre l'ennemi.

— Putain, mais vous allez finir par crever, bande de minables ?
— Jamais, Arès. Jamais nous n'accepterons de baisser les bras contre toi, déclare Marie.
— Nous sommes les chevaliers d'Athéna, ajoute Amalia. Tu nous trouveras toujours sur ton chemin.
— Le Sanctuaire n'est plus que l'ombre de ce qu'il était ; il a croulé sous votre corruption et votre égoïsme. Votre temps est révolu ! Il est l'heure de me laisser la place !
— Peut-être bien, reconnaît Sanka, mais on vaut toujours mieux que toi.
— Oui, nous avons beaucoup de choses à nous reprocher, ajoute Judith, mais nous avons prouvé qu'en des temps difficiles nous étions capables de rebondir et de retrouver nos valeurs d'antan afin de défendre la justice et la paix.
— Car nous sommes les chevaliers d'or, complété-je. Nous avons passé un serment sacré, et nous l'honorerons jusqu'au bout. Nous avons tout le poids de la volonté de nos ancêtres derrière nous ; nous ne décevrons pas leur mémoire. Nous ferons honneur à nos armures d'or.
— Ah oui, vos belles armures d'or… se moque Arès. Voilà ce que j'en fais de vos armures. TEIKHESIPLÊTÊS !

L'onde de choc de son attaque est violente et nous renverse tous. Pourtant, ce n'est pas aussi douloureux que ce à quoi j'aurais pu m'attendre. Non, comprends-je avec désespoir, ce n'est pas nous qu'il visait directement : ce sont nos armures. Il les a complètement détruites. Elles sont réduites à néant. Horreur !

— Allez, dis-moi comment je peux sauver ma déesse !

Plus loin, la voix de Fèmi tente toujours de convaincre Hidden de libérer Athéna.

— Sérieusement ? Penses-tu vraiment que je vais accepter de libérer notre ennemie ? Tu es vraiment idiote, chevalier des Gémeaux. Par le Rayon Argenté !

Fèmi se prend l'attaque de plein fouet, mais la puissance de son cosmos est suffisante pour repousser l'attaque.

— Allez, sois sympa ! Nous n'avons pas à nous battre, c'est ridicule. Nous étions encore alliés il y a même pas quelques mois. Je suis sûre que nous pouvons encore nous entendre. Peut-être pouvons-nous négocier. Je pourrais peut-être t'offrir quelques faveurs…
— Ah oui ? Même si c'est tentant, je ne peux cependant accepter. Je suis un gardien d'Aphrodite et je n'agis que pour satisfaire sa volonté.
— Tant pis. Je vais devoir trouver moi-même la solution.

Son cosmos explose. Le sol tremble sous ses pieds. Elle envoie une décharge d'énergie pour briser le cristal dans lequel est enfermée Athéna, sans aucun résultat.

— C'est inutile ! proteste Aphrodite, toujours concentrée à drainer l'énergie de la déesse de la guerre et de la sagesse pour alimenter ses arbres. Le Sceau Secret de l'Éternité est indestructible. Tu ne parviendras pas à le briser.
— C'est ce qu'on va voir… Il me faut juste un peu plus de puissance.

La fureur de son cosmos gagne en intensité. C'est impressionnant ! D'un niveau similaire à celui de Marie. Elle envoie une nouvelle décharge sur la prison d'Athéna. Le cristal vibre. Hidden commence à s'inquiéter. Il lance un nouveau Rayon Argenté, mais le cosmos de Fèmi lui renvoie l'attaque. Il tente ensuite d'utiliser les armes de la Balance Noire et charge les Gémeaux, mais le cosmos de Fèmi désintègre les lames avant son arrivée et repousse violemment le gardien de la Lune Cachée.

Fèmi continue de se déchaîner sur la cage d'Athéna, mais rien n'y fait ; elle est bien trop solide. Le Sceau serait-il vraiment indestructible comme le prétend la déesse de l'amour ?

— C'est inutile, je te dis ! Seule la force d'un dieu pourrait le détruire.
— Alors je dois encore gagner en puissance. Je fais appel à la puissance du loa Marassa, le maître des jumeaux. Puissiez-vous m'accorder la puissance de détruire le Sceau Sacré de l'Éternité.

L'atmosphère s'alourdit. Le ciel se couvre. Nous ressentons une obscure présence tandis que le cosmos de Fèmi continue à danser frénétiquement autour d'elle. Hidden, l'armure brisée et le corps ensanglanté, se relève et observe la scène d'un œil inquiet.

— Tu oses nous déranger, chevalier des Gémeaux ? Qu'as-tu à offrir pour nos services ?

Une double voix, à la fois grave et aiguë, vient de surgir on ne sait d'où. Les paroles sonnent étranges, inquiétantes.

— Marassa, je n'ai malheureusement rien à t'offrir pour le moment, mais j'ai absolument besoin de toi. Je te prie d'accéder à ma requête.
— Mortelle, pour qui nous prends-tu ? Nous ne sommes pas à ton service. Nous ne voyons pas pourquoi nous ferions cela gratuitement.
— Alors prenez ma vie ! C'est tout ce que j'ai à vous offrir.
— Soit. Nous acceptons ton sacrifice.

Le cosmos du chevalier des Gémeaux grimpe en flèche, à un niveau inimaginable. Il se teinte d'une couleur étrange, surnaturelle. Les vibrations résonnent dans tout le palais. Même Arès, inquiet, s'est tourné vers la scène au lieu de tenter de nous achever.

— Hidden ! hurle Aphrodite. Arrête-la, vite !

Le gardien forestier de la Lune Cachée obéit. Il s'empare d'un trident de la Balance Noire et retente un assaut alors que Fèmi relâche toute la puissance accumulée en direction du Sceau Sacré. Malheureusement pour Hidden, il est touché par l'énergie des Gémeaux. Il hurle de douleur avant de disparaître, désintégré.

Le cosmos frappe le Sceau, qui vibre et commence à se briser. Aphrodite utilise sa propre énergie pour contrer l'attaque mais la force déchaînée par Fèmi et Marassa est bien trop importante pour elle. Elle est projetée au loin tandis que la prison d'Athéna se brise.

Fèmi s'écrase au sol. Athéna se relève.

— Purée, moi qui pensais passer toute cette histoire sans me faire piéger, c'est encore loupé… Merci, Fèmi des Gémeaux ; je n'oublierai pas ton sacrifice. Bon, Aphrodite, où en étions-nous ? Ah oui, je m'apprêtais à te botter les fesses !
— Je ne me montrerais pas si sûre de moi si j'étais à ta place, se relève la déesse de l'amour. J'ai drainé beaucoup de ton énergie. Tu es affaiblie.

Bon, il ne reste plus que le combat entre les déesses et celui qui nous oppose, mes collègues et moi, à Arès. L'étau se resserre. Nous devons vaincre Arès le plus rapidement possible pour pouvoir soutenir notre déesse contre Aphrodite, mais sans armure, nous sommes bien plus fragiles.

— Alors, bande de minables, vous faites moins les malins maintenant sans votre armure…
— Si tu crois que ça va nous arrêter ! rétorque Marie.

Elle avance d'un pas et lance son Malleus Maleficarum. Arès ne se donne même pas la peine d'éviter l'attaque. Il la reçoit sans broncher puis laisse échapper un rire moqueur.

— Je vois que votre puissance touche à sa fin. Miaiph?nos !

Marie se tord de douleur, gueule, et crache du sang. Arès jubile à la torturer ainsi. Il fait durer son attaque. La Vierge pose un genou à terre. Elle résiste de toutes ses forces pour contrer l'attaque. Son cosmos gagne en intensité. Un cri de rage ! Sa fureur explose. Elle parvient à renvoyer l'attaque à l'expéditeur.

Un flash lumineux nous éblouit au-dessus d'elle ; quelqu'un – ou quelque chose – de puissant vient d'apparaître. Je plisse des yeux pour essayer de percevoir de quoi il s'agit. C'est une armure qui flotte là, et pas n'importe laquelle : l'armure divine d'Andromède ! Quoi ? Mais qu'est-ce que ça signifie ?

Les différentes pièces de l'armure se détachent pour venir s'assembler sur le corps de Marie. Les chaînes d'Andromède s'enroulent autour de ses bras. Marie rayonne d'une toute nouvelle énergie.

Peu après, les quatre autres armures divines des héros du temps des légendes apparaissent à leur tour. Celle du Cygne s'assemble sur Sanka, celle de Pégase sur Amalia, celle du Phénix sur Judith, et celle du Dragon m'est offerte.

Incroyable… c'est une aide inespérée qui nous est apportée. Je sens toute la puissance de l'armure résonner le long de ma peau. Ces armures divines sont sans nul doute bien supérieures aux armures d'or. J'ai l'impression que je vais pouvoir accomplir des miracles !

— Quoi ? s'énerve Arès. C'est impossible !
— J'avoue que j'pige pas, là, s'étonne Sanka, mais j'm'en fous. Elle a trop la classe, l'armure du Cygne.
— Quelle puissance sensationnelle ! s'émerveille Judith. J'ai l'impression que mes pouvoirs sont décuplés grâce à l'armure du Phénix. Oui, je sens que je suis de nouveau capable de me régénérer. J'ignore pourquoi nous avons reçu ces armures.
— C'est pourtant clair, il me semble, intervient Amalia. Les héros légendaires ont reconnu notre valeur et notre détermination. Du fond de leur tombe, ils nous ont envoyé leurs anciennes armures pour nous soutenir dans notre lutte contre Arès.
— Dans ce cas, ne les décevons pas, sourit Marie, et tuons l'hérétique au plus vite !
— Ouais, je suis partant ! me réjouis-je. Tiens-toi prêt, Arès : on va te mettre ta fessée !

Nous chargeons notre ennemi tandis que Judith se régénère grâce à son Sol Invictus. Oui, nous sommes plus rapides, plus résistants, plus forts. Le creuset qui nous séparait du dieu est désormais réduit. Quoi qu'il en soit, Arès se défend toujours bien, mais cette fois nos coups lui font mal. Il repousse notre premier assaut avec son Brotoloig?s.

Nous le bombardons maintenant avec nos pouvoirs, mais encore une fois ils ne sont pas assez efficaces pour le blesser réellement.

— Il nous faut vraiment ton Gae Bolga ! me crie Judith. Prépare-le, nous allons le retenir en attendant. Grâce à nos armures divines, nous en sommes capables.
— D'accord.

Je me mets en position et envoie mon cosmos vers le ciel prendre le contrôle des éléments. On va voir ce que cette armure du Dragon a dans le ventre !

Plus loin, le combat entre les déesses se poursuit ; désormais, elles se battent toutes deux à armes égales, Aphrodite ayant restauré un peu de sa puissance en puisant dans celle de sa consœur.

La foudre s'abat sur moi. Je la dompte sous une forme de boule de plasma. Arès tente de mettre à terre mes camarades pour m'atteindre, mais ces derniers lui tiennent tête. Je sculpte ma lance de foudre. Arès, plongé dans une frénésie absolue, parvient à mettre à terre Sanka et Judith. Mon arme est prête. C'est Amalia qui subit maintenant la fureur du dieu. Je charge. J'espère ne pas le louper.

— Par les chaînes d'Andromède ! lance Marie.

Les chaînes de son armure divine se déploient et viennent ligoter Arès. Il tente de se libérer, mais elles sont bien trop solides. Bien joué, ma belle ! Ainsi, je ne risque pas de le rater. Je pousse un cri de guerre avant de planter ma lance-foudre.

Arès hurle de douleur tandis que Gae Bolga lui transperce la poitrine. La puissance de l'attaque devient incontrôlable. Les énergies se libèrent dans une anarchie ardente. Le corps du dieu s'écrase au sol. Il respire encore mais ne bouge plus. Une mare de sang se répand ; il n'en a plus pour longtemps. Nous nous approchons de lui pour recueillir ses derniers mots.

— Bravo, chevaliers, vous a… argh (il crache du sang) vous avez réussi à me battre. Mais ne croyez pas en avoir fini définitivement avec moi : je reviendrai sous une forme ou une autre. Le cœur des hommes m'appellera. Il suffira d'une nouvelle crise pour que leurs peurs les gagnent et qu'ils se choisissent de nouveaux boucs émissaires. Ils se tourneront vers l'égoïsme et la haine. Ils oublieront les erreurs du passé et les répéteront. Ils me feront honneur car ainsi est le cœur des hommes. Vous ne pourrez rien y faire. J'ai hâte que vous voyiez votre monde plonger dans la folie, l'horreur et le chaos.

C'est après cette dernière mise en garde qu'Arès rend son dernier soupir. Cette fois, c'est quasiment fini. Nous marchons vers notre déesse et nous nous rangeons à ses côtés. Aphrodite est à genoux ; des larmes de désespoir coulent le long de ses joues.

— Ma chère Aphrodite, tout est fini, lance Athéna dans un dernier espoir de raisonner son amie. Rends-toi maintenant ; le sang a assez coulé. Tu ne peux plus rien faire contre nous, et beaucoup de civils comptent sur la protection que leur apporte ton Jardin.
— Je… hésite-t-elle. D'accord, j'abandonne.

Oui, c'est terminé. Nous poussons un soupir de soulagement et nous précipitons vers les corps de nos camarades. Athéna use de son énergie pour apporter les premiers soins à Emmanuello et Irma. Sanka pleure en découvrant le corps d'Ayéfèmi qui s'est sacrifiée pour sauver Athéna. Il s'agenouille près d'elle et lui prend la main. J'avance vers lui et pose une main sur son épaule en guise de réconfort.

— Elle respire ! réagit-il soudain. C'est incroyable, elle est toujours en vie !

Quoi ? Comment est-ce possible ? Fèmi avait pourtant parlé de se sacrifier. Alors comment se fait-il que… Oh, un détail attire mon attention : ses cheveux sont de couleur blanche, celle d'Ayé. Une seule de ses personnalités serait disparue ?